Je ne sais pas si vous verrez ce message, mais sachez que vos vidéos me sont très utiles pour approfondir ma pensée féministe et pour avoir une analyse fine des discours que je peux entendre sur la biologie des sexes. Un grand merci !
Oui c'est exactement ça ! Dans le DSM4, l'hystérie a disparu comme par enchantement quand l'ESPT (État de Stress Post tTaumatique) est apparu. Seuls, les trauma des guerres étaient reconnue, seuls les hommes pouvaient prétendre être soignés pour ça. Les femmes et notamment les victimes de viols atteintes à 85 % des mêmes symptômes ESPT étaient considérées comme hystériques ! Bravo la science !
Je suis dubitatif vis à vis de certains points. En quoi le positionnement et l'expérience corporelle d'une femme racisée, par exemple, influerait ou remettrait en cause des résultats de chimie quantique ou de mécanique céleste ? Un des principes des sciences, c'est que justement qu'on peut quantifier et effectuer des mesures indépendantes de qui est l'observateur et qui peuvent être reproduites. Et même en physique quantique, où l'action de l'observateur influe sur les résultats, qui que soit cet observateur. Il me semble donc que cette épistémologie a un champs d'application restreint aux sciences sociales et médicales, où effectivement, on peut postuler l'expérience individuelle aurait une influence sur les méthodes employées, les postulats et les conclusions des études.
J'ai découvert ta chaîne très récemment grâce à politikon et j'apprécie beaucoup tes vidéos. Merci pour ton travail :) ! Sinon cette vidéo fait un peu écho à une conférence récente de l'espace des sciences: [ Patricia Lemarchand ] Sexe, genre et inégalités d’accès aux soins médicaux th-cam.com/video/eo6IOYK9QGg/w-d-xo.html C'est intéressant à mettre en parallèle je trouve.
Jsuis en train de lire le 2eme sexe en ce moment ce qui rend pour moi tes propos assez clair. Et sinon pour la qualité de la vidéo (éclairage par exemple) je trouve pas qu'il y ai de problèmes. Comme dit dans d'autres commentaires ça serait intéressant de savoir "pourquoi les femmes sont si peu nombreuses/représentés dans les sciences" mais je pense qu'on connait déjà tous la réponse globablement. Autant aller directement (jdit ça parce que c'est une question que je me pose beaucoup :3 ) "à l'origine du patriarcat"
Cette question-là relève plus de la sociologie, c'est pour ça que je ne l'aborde pas : la réponse est à mon avis dans une étude poussée des dynamiques sociales de genre, de la manière dont on discrimine encore dans l'éducation, même si ça n'est pas toujours une discrimination violente et patente, plus une discrimination suffisamment subtile pour qu'on n'ai pas l'impression de "mal faire". Et puis aussi on est encore dans une société sexiste, malgré le travail qu'on essaie de faire pour que ça cesse. Mais oui c'est une question fondamentale, je crois que j'ai un bouquin de psycho/socio qui traîne quelque part chez moi, je projette toujours d'y jeter un oeil :p Quant à "l'origine du patriarcat", c'est encore un autre boulot, il y a plein de théories, j'y viendrais :) Merci pour ton intérêt pour la chaîne!
Pour ajouter un détail, je joins des liens vers l'étude de Steven Spencer en 1999, ainsi que celle de Huguet &Régner en 2007 mettant en exergue la "menace du stéréotype". Ces études démontrent que l'effet psychologique du stéréotype "les femmes sont mauvaises en mathématique" va influencer les résultats que les femmes obtiennent aux tests. Les observations confirment les prémisses puisque selon que le même examen soit nommé "test de maths" ou "exercice de mémorisation" (étude de Hugue & Régner), les résultats des filles sont inférieurs (maths) ou équivalents (mémorisation) à ceux des garçons. - Etude de Steven Spencer (1999): doi.org/10.1006/jesp.1998.1373 - Etude de Hugue & Régner (2007): eric.ed.gov/?id=EJ772026
Merci pour ta vidéo, c'était très clair. Si j'ai bien compris il y a deux revendications : a/ Chasser le sexisme et l'anthropocentrisme qui biaise l'objectivité scientifique. b/ Reconnaître l'impossibilité de la neutralité des sciences, reconnaitre leur partialité essentielle. Deux revendications qui semblent en tension l'une avec l'autre car (a) milite en faveur d'une plus grande objectivité scientifique et (b) milite contre la prétention scientifique à tenir un discourt unique comme s'il n'existait pas une pluralité de positionnements possibles. (a) est motivé par l'absence de considération et d’intérêt envers les femmes dans les sciences et la présence de biais liés au sexisme, et (b) est motivé par le fait que la façon de comprendre le monde, pour un scientifique, est conditionnée par sa sociabilisation, et qu'il existe une différence factuelle entre la sociabilisation des femmes et celle des hommes, rendant tout discourt scientifique emprunt de ce point de vue particulier. Si j'ai toujours bien compris, l'accusation de relativisme (à l'encontre de (a)) est remis en cause par Sandra G. Harding qui soutient que l'objectivité n'est pas à jeté. Science objective = science démocratique qui obéit à des normes anti sexistes, anti racistes, etc. Un point de vue scientifique non féministe peut être accepté à partir du moment où il respecte ces normes. On peut donc accepter la partialité essentielle des sciences, tout en niant que tout point de vue se vaut. Je pense que l'accusation de relativisme rode toujours et qu'il n'a été que restreint par Harding. En effet, si un.e scientifique non féministe qui respecte les normes d'objectivité non sexistes et non raciste soutient p, et qu'un.e scientifique féministe soutient non p, alors est ce que les deux discourt se valent ? On ne peut pas accepter une chose et son contraire, alors qui croire ? Est-il réellement impossible de trancher rationnellement entre les deux ? Personnellement, je m'oppose à (b). J'ai tendance à penser que lorsque l'on est capable de se rendre conscient de ses biais, alors on est capable de les éviter (c'est pas toujours le cas, mais avec un peu d'effort, d'humilité, d’honnêteté, et d'éducation, on en est capable). Les féministes des sciences ont fait un travail louable pour dénoncer les biais androcentré dans les sciences. Mais je ne comprends pas pourquoi il serait impossible, même pour un homme, de se détacher de ces biais, une fois qu'on en a pris conscience. Pour en arriver à construire des théories aussi élaborées que celle de la physique quantique, on a du essuyer énormément de biais cognitifs, d'erreurs en tout genre, pourquoi en irait-il différemment pour les biais sexistes ? Je ne pense pas que c'est en opposant à un discourt biaisé, un autre discourt partisan, que l'on parviendra à une science objective. Etre objectif, ce n'est pas rendre compte démocratiquement des différents points de vues pertinents qui respecteraient une certaine norme non sexiste et non raciste. Etre objectif, c'est rendre compte de la réalité telle qu'elle est, avec les moyens qu'on a. Et pour être objectif, toutes les critiques mettant en lumière des biais qui nous ferait nous tromper sur ce qu'est la réalité sont les bienvenues. Ce qu'il faut faire, c'est dénoncer les biais, et corriger notre jugement, non multiplier les points de vue, car la réalité, contrairement à nos représentations, n'est pas multiple. S'il n'est pas le cas que l'ovule est passif et que les spermatozoïdes seraient seuls actifs, alors ce n'est pas le cas, et les scientifiques qui serait dans le dénis face aux preuves n'ont pas de légitimité à l'être et leurs discourt n'a pas à recevoir de reconnaissance au nom de l'impossibilité de la neutralité. Notre sexisme nous a biaisé, on se corrige, on prends conscience de nos biais, on fait un travail sur soi, et on va de l'avant avec un regard plus objectif (je ne dis pas que c'est ce qui est fait, je dis que c'est ce qu'il faut faire). Bien sur, je présuppose qu'il est possible d'être objectif malgré sa sociabilisation. Mais je ne sais pas trop quoi répondre à celles et ceux qui n'y croit pas. Si ce n'est : les premières féministes ont été éduquées dans une société patriarcale, elles ont reçu une sociabilisation qui présentait la domination masculine comme normale. Pourtant, elles ont réussis à comprendre l'ampleur et les mécanismes réels de l'oppression en se défaisant de ces biais intériorisés et hérités de leurs sociabilisations. Cette oppression, ce n'est pas un point de vue, c'est réel, et il a été tout à fait possible pour elles de se défaire de leurs biais afin de voir l'oppression en toute objectivité.
En fait, la démarche épistémologique décrite ici peut se comprendre dans le cadre d'un "holisme de la confirmation" (thèse de Duhem Quine) : En science, les hypothèses ne sont jamais testées isolément mais "par groupe" (par exemple, en plongeant un thermomètre dans de l'huile en ébullition, on ne fait pas que tester la température d'ébullition de l'huile : On teste aussi le bon fonctionnement du thermomètre, la théorie électromagnétique qui permet de le faire fonctionner, le fait que le liquide soit bien de l'huile et pas du liquide vaisselle, etc...). Or, identifier les hypothèses auxiliaires qui accompagnent la vérification d'une théorie n'est pas toujours évident et on peut tout à fait imaginer que certaines d'entre elles reposent sur des biais sexistes. Cela dit, comme cela a été relevé, j'imagine que les sciences touchant au social ou à la biologie y sont beaucoup plus sujettes que les autres.
Effectivement on peut envisager de lier l'épistémologie féministe à certaines thèses de l'épistémologie en générale. Mais je pense que la question du caractère politique de la formation des savoirs se trouve plutôt dans la sociologie des sciences :) Merci pour votre intérêt pour mon travail !
@@GameOfHearth Oui, effectivement, je n'y avait pas pensé mais le caractère social du fonctionnement des institutions scientifiques est susceptible de jouer un rôle important également, ne serait ce que dans le choix des thématiques de recherche, par exemple... Bonne continuation pour la chaine, elle est vraiment chouette. Ces thématiques sont un peu nouvelles pour moi et j'apprends plein de trucs... :-)
Merci pour cette vidéo ! Je n'ai pas réussi à saisir le nom de l'épistémologue (?) féministe citée à 17:17, est-ce que quelqu'un.e la connaîtrait svp ? Cela me serait utile pour en apprendre plus ! (Elle ne me semble pas être indiquée dans la bibliographie.)
Bonjour, Le discours de la vidéo, certainement dû à son format court, me laisse à penser qu'il y a une grande confusion entre Science et scientifiques, ainsi qu'entre chercheurs et pratiquants dans l'épistémologie féministes (notamment concernant l'exemple du gynécologue). Est-ce vraiment la méthode scientifique qui est critiquée (à savoir "l'expérimentation" de F. Bacon et la "réfutabilité" de K. Popper) ou la conclusion donnée aux résultats (la binarité naturelle des sexes par exemple)? Car s'il est aisé de désigner les biais (cognitifs et facteurs confondants) de certaines disciplines scientifiques comme la Sociologie ou l'Histoire (biais normalement anticipés dans le protocole de l'étude), il me semble moins évident de les dégager dans les sciences dites dures. Je vous félicite pour votre travail sur l'ensemble des vidéos, elles sont aussi passionnantes que rigoureuses.
Oui il faut entendre "science" ici non pas comme "méthode scientifique" dans le sens où vous l'entendez, mais comme "ensemble d'institutions situées dans le temps et l'espace". La métonymie était une facilité d'énonciation. Et en effet il y a des sciences qui tombent hors du champ de l'épistémologie féministe :) Merci pour votre intérêt pour la chaîne!
Notez cependant qu'en ce qui concerne la "binarité naturelle sexes", la biologie ne tient pas/plus dans ce genre de discours. C'est même l'une des sciences qui a été le plus attaquée (à juste titre) par l'épistémologie féministe. Cest la manière dont la biologie du sexe est enseignée actuellement, de manière incomplète et caricaturale, qui pose encore problème. Je vous conseille sur ce sujet ma vidéo sur Thierry Hoquet, à propos de son ouvrage "Des sexes innombrables", qui explique la conception biologique du sexe.
@@GameOfHearth Il y a tout de même un point qui m'ennuie lorsque vous énoncez que la science argue découvrir la vérité. La science, si elle n'est pas objective, est la discipline la moins subjective que nous possédons, en ce qu'elle ne prétend pas ses théories vraies mais non réfutées pour le moment. Les scientifiques, appliquant la même méthode, peuvent donc être considérés comme les plus neutres dans leurs analyses. Dans la réalité, on constate néanmoins que les conclusions ne tiennent pas compte toujours de ce principe de neutralité, mais les écarts sont atténués par le consensus scientifique. Une étude ne signifie rien. Elle n'acquiert une valeur qu'à l'intérieur d'une cohorte de recherches confirmant son résultat. Mon exemple de la binarité sexuelle allait dans le sens de votre dernier message, à savoir une conclusion de recherches orientée. J'ai déjà visionné votre vidéo sur Thierry Hoquet (dont j’avais apprécié "Darwin contre Darwin : comment lire l'origine des espèces") qui est elle aussi très intéressante. D'ailleurs, cela illustre parfaitement que même si certaines institutions scientifiques (en l’espèce, l'American College of Pediatricians - les experts de l'argument du "naturel") nient la nuance de l'intersexualité, la science reste neutre en opposant des études antinomiques. L'épistémologie féministe prend effectivement tout son sens ici. Enfin (et je me tais), la science est toujours très mal enseignée avec parfois 50 ans de retard sur l'état des connaissances actuelles. On apprend encore aux enfants que le modèle Newtonien de la Gravitation Universelle fonctionne, on qualifie toujours les rois francs mérovingiens de rois fainéants, voire on omet la contribution d'éminentes chercheuses telles qu'Emmy Noether en mathématique.
Bien sûr, mais le travail de l'épistémologie féministe va dans le sens de la réforme des sciences, pour de meilleures sciences, rien d'autre, c'est exactement comme vous dites, c'est simplement une orientation de la critique épistémologique parmi d'autres :) (Par ailleurs, j'insiste : je fais de l'histoire des idées, je décris, je ne prescris pas, même si parfois je sais que je porte aussi mes opinions - qui ne doivent rester que cela). Pour votre dernière remarque : oui, il y a toujours un retard dans l'enseignement, et c'est tout de même particulièrement pénible. Peut-être que ça l'est encore plus quand il s'agit, par exemple dans le cas de l'expression du dymorphisme sexuel, d'être mal (ou pas du tout) renseignés sur la diversité des corps humains qui nous entourent. Si vous avez apprécié la vidéo sur l'ouvrage de Thierry Hoquet, vous serez peut-être satisfait d'apprendre qu'elle aura une suite, probablement vers le mois d'octobre!
@@GameOfHearth En tout cas, vous avez mis en lumière une partie de l'épistémologie dont j'ignorais les fondements. Je me cantonnais à une lecture ontologique très/ trop classique (biais de confirmation je suppose). Il a effectivement des erreurs dans l’enseignement qui sont plus dommageables que d'autres. Personne n'est particulièrement affecté de penser la gravitation comme une force plutôt qu'une courbure de l'espace - temps. En revanche, croire qu'il existe une norme dans les séquences de gamètes, ou plus généralement une règle naturelle que l'on pourrait déduire de l'expression d'un phénotypage majoritaire, est le meilleur moyen d'angoisser les personnes aux extrémités du spectre. Je regarderai avec plaisir la suite. J'espère à ce propos que vous obtiendrez d'ici là un nombre d'abonnés proportionnel à la qualité de votre travail (beaucoup beaucoup plus^^).
Bonjour, Tout d'abord j'ai apprécié la vidéo, très claire par ailleurs. Je me demandais s'il était possible d'avoir des approfondissement par rapport à la dernière personne que tu cites, critique envers le relativisme. Je ne suis pas sur d'avoir saisi tous les enjeux de l'aspect démocratique et ses limites.
Ok! Alors, un des problèmes que rencontre l'épistémologie féministe dans sa critique de la scientificité, c'est l'accusation de relativisme. Être relativiste, c'est dire que tous les points de vue sont également valables, puisque de toute manière on a affirmé que la science est produite depuis des points de vue, qu'il n'y a pas d'observateur neutre. Mais du coup, ça ouvre la porte à tout un tas de points de vue, d'options politiques dont on ne veut pas (à raison) entendre parler - pour aller dans ce qu'on fait de pire, disons le nazisme. Ce que dit Sandra Harding, c'est que non, l'épistémologie féministe ne mène pas à un dangereux relativisme qui accepterait toutes les idéologies politiques comme étant de bons points de départ des sciences. D'où son affirmation que l'épistémologie féministe doit/est politiquement engagée dans la production d'une science démocratique, c'est-à-dire ouverte, dévoilant ses travaux, mais également refusant certaines positions en ce qu'elles sont discriminantes (le racisme et le sexisme en l'occurrence, sont citées par Harding). Ce qui compte avec une épistémologie du standpoint, c'est d'ouvrir les sciences, sans que ça soit synonyme de rationalisation de la haine d'autrui, ou d'investissement des sciences par un pouvoir fascisant. Dire qu'on fait de la science avec un objectif politique, ça n'est pas accepter que toutes les politiques soient également dignes pour mener la science. Dis-moi si c'est plus clair ou s'il y a encore des points obscurs :)
Merci pour ton éclaircisement. Disons que c'est un peu plus clair, mais par ex. je sais que chez des scientifiques, la résistance à l'ouverture démocratique de la science se fait sur des arguments récurent : le 1er c'est de dire que 1+1=2 n'est pas une décision démocratique, mais le fruit de la science, sous-entendu, de ce que j'en comprend, que toute les propositions scientifique ne sont pas par essence discutable, mais que p.ê seule certaines puissent l'être. Par ailleurs l'autre opposition que j'ai rencontré récemment, c'est que la société civile est considéré, tout comme les industriels comme un lobby. Ils le mettent au même niveau. En général ce que je répond dans ce cas la, c'est que l'on pourrait dire la même chose de l'Etat, mais ça ne les convainct pas vraiment. Enfin, le plus obvious, c'est qu'on nous reproche le lyssenkisme, c'est à dire une science orienté politiquement, mais qui était plus idéologique que fonctionnelle. En général dans ce cas là, j'essaye de bien montré la distinction entre science et technique.
Oui en effet, la question politique est à mon avis à croiser avec la question de savoir de quelle science il s'agit, de même que dans quelle société démocratique nous trouvons-nous (ou pas). Je pense qu'on peut dire que les épistémologies féministes ne sont pas applicables en l'état, ni ne sont une programmatique de recherche unifiée. L'épistémologie féministe tend à se développer ostensiblement dans les disciplines où c'est possible, notamment le plus évident: les sciences humaines et la biologie. Work in progress :)
@@GameOfHearth bonjour, je ne vois cette vidéo qu'aujourd'hui. Très intéressante, évidemment, j'avais déjà vu et compris (disons dans les grandes lignes en tout cas !) ailleurs les problématiques du positionnement mais il y a dans votre vidéo ce point sur le relativisme - c'est pourquoi je réponds en réponse à ce commentaire - qui mériterai peut être d'être creusé (peut être l'avez vous fait ailleurs auquel cas pardon pour ce commentaire inutile) : Vous citez comme opposition au fait que ce serait relativiste l'idée que ce qui serait plus valable en science serait une science non sexiste, non raciste, démocratique. Ça semble une évidence, et en même temps la connotation très militante et politisée des termes est un cache misère pratique à ceux qui se défendent d'avoir des biais car il seraient non militants et apolitiques. J'imagine que la philosophie des sciences, et les personnes que vous citez sur le sujet, ont travaillé plus en profondeur sur ce sujet qu'un simple "si c'est démocratique ce sera une meilleure science" et je serais très intéressé personnellement par de la vulgarisation sur ce point ( si ça rentre dans le champ de votre chaîne évidemment !). On lit souvent à propos de la science qu'elle n'est justement pas démocratique (puisqu'on ne vote pas/toutes les voix ne se valent pas), avec je pense un flou et une confusion similaire à ce qu'on peut lire à propos d'un féminisme qui serait contre les hommes ou une sciences féministe qui serait, puisque militante, nécessairement biaisée. Je ne sais pas si je suis clair :D Merci et bravo pour votre travail
@@bugin4709 Bonjour, je réagis au 1+1=2: Ce n'est ni une décision démocratique, ni le fruit de la science. C'est une convention, comme le mètre ou le kilogramme. Pour le plaisir: la BD Logicomix nous plonge dans l'aventure de deux mathématiciens qui tentent de fonder 1+1=2 "scientifiquement", je la recommande.
La vidéo est bien montée est intéressante. Je trouve qu'il y a beaucoup d'erreur de raisonnement, de raccourcis et de biais qui font perdre a beaucoup des points étudiés leur pertinence.
Notez qu'il s'agit d'une vidéo de vulgarisation, et qu'elle est forcément incomplète par rapport à la montagne de papiers universitaires qu'il est question de résumer ici :) Pour vous faire une idée plus exhaustive des thématiques abordées, vous pouvez aller voir en la bibliographie en barre d'info.
Oui :) Pour des exemples tu peux regarder la vidéo sur Priscille Touraille, et celle avec Thomas Crespo ("Les féministes sont-elles biophobes" - les deux sont surtout axées sur la biologie.
ça m'a fait penser à: un petit billet d'un prof de SES qui distingue l'objectivité et la neutralité: uneheuredepeine.blogspot.com/2014/03/avoir-un-point-de-vue-ca-narrive-pas.html et une réflexion d'une chercheuse, Noémie Marignier, critiquant l'injonction à se situer...mais d'un point de vue situé^^ reflexivites.hypotheses.org/5967 plus précisément, c'est l'idée que se dire situé n'équivaut pas à une véritable prise en compte de sa position qui modifierait le discours que l'on tient sur son objet. Une absence de réflexivité sur cette question, et l'idée aussi que, n'étant pas transparents à nous-mêmes, nous méconnaissons parfois en quoi nous nous trouvons "situés" par rapport à ce qu'on étudie (elle prend l'exemple de sa propre recherche sur les personnes intersexes
Ce sont des questions importantes pour les sciences humaines (comme en témoignent ces billets, qui sont la partie émergée de l'iceberg en fait), mais aussi pour les sciences en général. On trouve à ce propos, dans chaque discipline, des kilomètres de papiers universitaires :) Merci pour les références !
Très bonne vidéo encore une fois , ça m'a rappelé cette vidéo th-cam.com/video/sA_mMdcmCJQ/w-d-xo.html qui se concentrait sur le pourquoi du faible nombre de femme travaillant dans les sciences ^^ Sinon j'aurais une question sur comment s'articule l'épistémologie féministe avec les sciences qui n'étudient pas l'homme en direct, je prends un exemple caricatural , mais me dire que le fait que la Terre soit ronde (on pourrait être plus précis bien sûr) soit découvert par Aristote un homme grec , je ne vois pas en quoi ça change ce fait, et donc comment par extension comment l'épistémologie féministe traite la physique , la chimie , la géologie et d'autres sciences qui n'étudient pas l'homme ? Ou alors l'épistémologie féministe pour les sciences qui n'ont pas pour sujet l'homme vont plutôt se concentrer sur comment faire pour que les femmes soient reconnues et pas invisibilisées par les hommes ?
Merci pour ta question ! Du coup, les épistémologies féministes se sont d’abord intéressées aux sciences humaines, puis aux sciences bio-médicales. Ce qu’il faut savoir, c’est que si le courant de pensée à peiné à traverser l’Atlantique (pour arriver en France indeed), c’est précisément parce que les chercheuses françaises ont trouvé que c’était des épistémologies trop générales, trop englobantes par rapport à la diversité des pratiques et des sujets d’études des sciences. Du coup ça faisait rester cette épistémologie dans le sphère de la réflexion philosophique, et l’application en termes de pratiques scientifiques restait marginale. Et bien sûr d’intenses discussions autour de cette critique. D’ailleurs, un des conflits « en interne » des épistémologies féministes a été celui qui tourne autour de la volonté de partir d’expérience concrètes, de ne jamais oublier ce point de départ matérialiste, très ancré dans les pratiques, qui a été à l’origine des épistémologies féministes. En effet, il se trouve que les universitaires théorisant l’épistémologie n’étaient pas les mieux placées pour parler de « pratiques », précisément. Du coup on voit mal, si on suit ce point de départ des pratiques, comment on pourrait aller jusqu’à causer mathématiques ou physique avec l’épistémologie féministe - à part bien sûr par un travail sur la mixité dans les labo. Alors, comment ça se passe, ce fameux "saut" entre "les sciences" et "les sciences qui parlent des humains" : Maria Puig de la Bellacasa (« Politiques féministes et construction des savoirs ») s’appuie sur Stengers (une épistémologue qui ne s’inscrit qu’épisodiquement dans la tradition de pensée féministe) pour expliciter le passage du dispositif expérimental pour observer « les faits » de manière abstraite qu’a mis en place Galilée avec le plan incliné, à la généralisation de ce dispositif dans toutes les sciences. En gros on a la généralisation d’un processus extrêmement particulier et situé (le dispositif expérimental construit qui tente d’isoler des phénomènes pour en tirer les lois universelles de la nature, comme par exemple la loi de l’attraction terrestre), et cette généralisation devient une manière de discriminer entre ce qui peut être considéré comme de la science et ce qui ne peut pas l’être. C’est cette généralisation du même modèle de scientificité qui est questionné par les épistémologies féministes, et qui font qu’elles parlent « des sciences » en généralisant, et non pas toujours « des sciences » en entrant dans les méthodologies multiples. Du coup, la critique porte sur la généralisation peu scrupuleuse de la prétention à l’objectivité d’un certain modèle pour faire de la science. Cette généralisation se fait avec une certaine autorité, qui n’est pas questionnée, malgré le fait qu’il y a une « diversité des rapports au monde et [une] multiplicité de types de réalité. » p.143 Et donc pour Anne Fausto-Sterling (biologiste), reformulée par M.P.dlB : « Il y aurait un modèle de science, la pensée scientifique occidentale, qui a des atouts importants pour certains types de réalité et, aussi, il y a des sciences qui s’adressent à différentes réalités, le comportement social complexe par exemple - et même aussi à une grande partie de la biologie cellulaire. » p.143 Donc il y a certains phénomènes et certaines sciences qui les étudient, qui ne sauraient être apolitiques, se considérer comme non situées. La généralisation du modèle expérimentale à la Galilée ne marche pas toujours. Pour résumer : est critiquée l’uniformisation de la méthode scientifique qui prétend à l’objectivité par un dispositif d’observation abstrait. De ce côté là, l’épistémologie féministe est une épistémologie critique qui n’a de lien avec le féminisme que son point de départ, qui l’a menée à la critique de l’abstraction à prétention objectiviste. Ce qui particularise l’épistémologie féministe, c’est ce qui se manifeste au sein des sciences prises une à une.
@@GameOfHearth Merci beaucoup pour la qualité de ta réponse, elle mérite d'être profondément méditée... J'aurais une question subsidiaire, est-ce que les sciences plus abstraites comme les mathématiques ou l'informatique souffrent de ce biais de généralisation quand elles ne sont pas la plupart du temps basées sur l'observation ?
@@josephlemoucque827 haha là pour le coup c'est complètement hors de mes compétences ^^ je pense qu'il faut aller voir vers l'épistémologie de ces disciplines plus précisément ;)
Je n'ai pas vraiment entendu parler dans ta vidéo de la distinction entre la neutralité et l'objectivité. Ou plutôt, dans un seul sens. Tu démontes, à juste titre, l'idée qu'il existerait une neutralité préalable, et que par conséquent, on ne peut pas se croire objectif en s'appuyant sur notre prétendue (et fausse, illusoire) neutralité. Mais il me semble que ça contourne une question fondamentale, qui est celle de la chronologie. Tu pars du principe que l'on a une opinion initiale, et que l'on chercherait à la confirmer avec les sciences. C'est effectivement l'argument que beaucoup de gens utilisent à tort contre les scientifiques militants, et je comprends la nécessité de le démonter. Mais il me semble que tu oublies la possibilité chronologique inverse, à savoir que l'on soit militant, ou du moins autrement militant, en raison des sciences. C'est-à-dire que l'avancée de la recherche nous fasse précisément devenir militant/autrement militant. Dans ce cas, c'est l'engagement qui découle de l'objectivité, et non l'inverse. Ainsi, la question de neutralité-objectivité est caduque si la chronologie est inversée. Ce qui ne signifie pas qu'elle le soit toujours. Je n'ai hélas pas encore lu tes références bibliographiques, quoique j'ai Donna Haraway qui m'attende. Donc j'ignore si cette possibilité est déjà prise en compte dans leurs ouvrages, car ce pourrait tout autant être un choix de ta part que de proposer une vidéo courte, et de répondre seulement aux accusations majeures. Quoi qu'il en soit, je tenais à partager cette nuance qui augmente ton propos plus qu'il ne le contredit. Je viens de découvrir ta chaîne et je suis extrêmement content du contenu que tu proposes. (Tu peux remercier le groupe "écoutes anarchistes"). Bonne continuation.
Bonjour et merci pour ton intérêt pour la chaîne! Pour répondre à ta question, déjà une chose : je présente une branche de la recherche universitaire, en aucun cas je ne prends pour moi les discours que j'explique. L'exposition de mes opinions n'est pas mon but. Ensuite pour rentrer dans le vif de ta question: il n'est pas vraiment question, dans l'épistémologie féministe, d'un militantisme sexiste conscientisé qui s'exprimerait à travers la manipulation de la science. La notion de "point de vue" est crucial en ce sens: nier avoir un point de vue d'où l'on parle, ça n'est pas forcément être politiquement de mauvaise foi pour cacher un agenda. On peut être sexiste en l'ignorant: en prendre conscience nécessite une fréquentation intellectuelle des concepts féministes ou anti-sexistes. On peut, par la suite, refuser l'idée d'avoir un point de vue, ou trouver que les idées de notre point de vue sont plus légitimes que celles des autres. Mais c'est déjà dans l'idée qu'une dénonciation a été faite sur le caractère situé d'une production de connaissance. Par conséquent, ce que dira l'épistémologie féministe, c'est qu'il n'y a pas de point de vue neutre (enfin, ça, c'est pour l'épistémologie féministe plus récente, qui radicalise sa critique de la scientificité), et que toute production scientifique est marquée par un point de vue, que les scientifiques le veuillent ou non. Par conséquent, qu'une connaissance scientifique mène à du militantisme dans un second temps n'annule aucunement le point de vue de départ, non conscientisé. Dis-moi si ça n'est pas clair :)
@@GameOfHearth Je ne sais pas si "c'est clair", mais du moins, j'ai compris ce que tu voulais dire. Nous sommes tout à fait d'accord sur la question de la nécessité de prendre en compte la présence de dogmes implantés en nous malgré qu'on en ait. Les apolitiques sont toujours politiques à leur insu. Il est vrai que la question de la conscientisation me paraît essentielle pour compléter ton propos. En ce qui me concerne, je viens du féminisme par le militantisme, et de l'épistémologie par ma formation universitaire, donc j'ai deux origines différentes pour ces questions. Et c'est vrai que ma remarque porte plus sur une question d'épistémologie générale, dans le sens où, hors du milieu de la recherche, les gens ne comprennent guère ce que nous faisons, et sont persuadés de l'incompatibilité entre engagement et objectivité. À vrai dire, tu as raison de dire que "quoi qu'il en soit, la neutralité n'existe pas". La question de l'inversion causale sert plus à répondre à des gens "non-politisables" qui nieraient la prémisse que tu poses. Merci pour ta réponse, et bonne continuation.
cette chaîne manquait à youtube faut pas se le cacher
merci bcp pour cette vidéo et les autres ! :)
merci beaucoup punaise, c'est trop bien que ta chaîne existe ! merci et bravo pour le taf de recherche et de synthèse !
Je ne sais pas si vous verrez ce message, mais sachez que vos vidéos me sont très utiles pour approfondir ma pensée féministe et pour avoir une analyse fine des discours que je peux entendre sur la biologie des sexes. Un grand merci !
Je découvre ta chaîne.
Merci pour ce superbe travail.
Tout cela déboîte comme il se doit !
Oui c'est exactement ça ! Dans le DSM4, l'hystérie a disparu comme par enchantement quand l'ESPT (État de Stress Post tTaumatique) est apparu. Seuls, les trauma des guerres étaient reconnue, seuls les hommes pouvaient prétendre être soignés pour ça.
Les femmes et notamment les victimes de viols atteintes à 85 % des mêmes symptômes ESPT étaient considérées comme hystériques ! Bravo la science !
Par contre je ne trouve pas de lecture en français sur les "sciences démocratiques" (Harding)... Please HELP ?!
Ouuuuiiiii je me délecte de chaque vidéo, c'est tellement dense que j'arrive pas à binge watcher, mais je continue de regarder assidument !
et je LUTTE pour ne pas jumper direct à Monique Wittig ! :p
\o/
Wow quel excellent niveau d'explication 😲 merci
Je suis dubitatif vis à vis de certains points. En quoi le positionnement et l'expérience corporelle d'une femme racisée, par exemple, influerait ou remettrait en cause des résultats de chimie quantique ou de mécanique céleste ? Un des principes des sciences, c'est que justement qu'on peut quantifier et effectuer des mesures indépendantes de qui est l'observateur et qui peuvent être reproduites. Et même en physique quantique, où l'action de l'observateur influe sur les résultats, qui que soit cet observateur.
Il me semble donc que cette épistémologie a un champs d'application restreint aux sciences sociales et médicales, où effectivement, on peut postuler l'expérience individuelle aurait une influence sur les méthodes employées, les postulats et les conclusions des études.
Oui! Ce point a été soulevé plusieurs fois dans des commentaires précédents, j'y ai répondu, si tu veux voir :)
J'ai découvert ta chaîne très récemment grâce à politikon et j'apprécie beaucoup tes vidéos. Merci pour ton travail :) !
Sinon cette vidéo fait un peu écho à une conférence récente de l'espace des sciences:
[ Patricia Lemarchand ] Sexe, genre et inégalités d’accès aux soins médicaux
th-cam.com/video/eo6IOYK9QGg/w-d-xo.html
C'est intéressant à mettre en parallèle je trouve.
Merci pour la référence!
Mdrrrr Levi-Strauss ...
Merci pour la transmission de ton savoir !!!
Merci pour cette chaîne ! Continue stppp on a besoin de toi meuf !
bien joué
Jsuis en train de lire le 2eme sexe en ce moment ce qui rend pour moi tes propos assez clair. Et sinon pour la qualité de la vidéo (éclairage par exemple) je trouve pas qu'il y ai de problèmes.
Comme dit dans d'autres commentaires ça serait intéressant de savoir "pourquoi les femmes sont si peu nombreuses/représentés dans les sciences" mais je pense qu'on connait déjà tous la réponse globablement.
Autant aller directement (jdit ça parce que c'est une question que je me pose beaucoup :3 ) "à l'origine du patriarcat"
Cette question-là relève plus de la sociologie, c'est pour ça que je ne l'aborde pas : la réponse est à mon avis dans une étude poussée des dynamiques sociales de genre, de la manière dont on discrimine encore dans l'éducation, même si ça n'est pas toujours une discrimination violente et patente, plus une discrimination suffisamment subtile pour qu'on n'ai pas l'impression de "mal faire". Et puis aussi on est encore dans une société sexiste, malgré le travail qu'on essaie de faire pour que ça cesse. Mais oui c'est une question fondamentale, je crois que j'ai un bouquin de psycho/socio qui traîne quelque part chez moi, je projette toujours d'y jeter un oeil :p
Quant à "l'origine du patriarcat", c'est encore un autre boulot, il y a plein de théories, j'y viendrais :) Merci pour ton intérêt pour la chaîne!
Pour ajouter un détail, je joins des liens vers l'étude de Steven Spencer en 1999, ainsi que celle de Huguet &Régner en 2007 mettant en exergue la "menace du stéréotype".
Ces études démontrent que l'effet psychologique du stéréotype "les femmes sont mauvaises en mathématique" va influencer les résultats que les femmes obtiennent aux tests.
Les observations confirment les prémisses puisque selon que le même examen soit nommé "test de maths" ou "exercice de mémorisation" (étude de Hugue & Régner), les résultats des filles sont inférieurs (maths) ou équivalents (mémorisation) à ceux des garçons.
- Etude de Steven Spencer (1999): doi.org/10.1006/jesp.1998.1373
- Etude de Hugue & Régner (2007): eric.ed.gov/?id=EJ772026
Instructif 🥰. Stp quand on demande les apports méthodologiques et épistémologiques de l’anthropologie féministe ??
Merci, très intéressant
Merci pour ta vidéo, c'était très clair.
Si j'ai bien compris il y a deux revendications :
a/ Chasser le sexisme et l'anthropocentrisme qui biaise l'objectivité scientifique.
b/ Reconnaître l'impossibilité de la neutralité des sciences, reconnaitre leur partialité essentielle.
Deux revendications qui semblent en tension l'une avec l'autre car (a) milite en faveur d'une plus grande objectivité scientifique et (b) milite contre la prétention scientifique à tenir un discourt unique comme s'il n'existait pas une pluralité de positionnements possibles. (a) est motivé par l'absence de considération et d’intérêt envers les femmes dans les sciences et la présence de biais liés au sexisme, et (b) est motivé par le fait que la façon de comprendre le monde, pour un scientifique, est conditionnée par sa sociabilisation, et qu'il existe une différence factuelle entre la sociabilisation des femmes et celle des hommes, rendant tout discourt scientifique emprunt de ce point de vue particulier.
Si j'ai toujours bien compris, l'accusation de relativisme (à l'encontre de (a)) est remis en cause par Sandra G. Harding qui soutient que l'objectivité n'est pas à jeté. Science objective = science démocratique qui obéit à des normes anti sexistes, anti racistes, etc. Un point de vue scientifique non féministe peut être accepté à partir du moment où il respecte ces normes. On peut donc accepter la partialité essentielle des sciences, tout en niant que tout point de vue se vaut.
Je pense que l'accusation de relativisme rode toujours et qu'il n'a été que restreint par Harding. En effet, si un.e scientifique non féministe qui respecte les normes d'objectivité non sexistes et non raciste soutient p, et qu'un.e scientifique féministe soutient non p, alors est ce que les deux discourt se valent ? On ne peut pas accepter une chose et son contraire, alors qui croire ? Est-il réellement impossible de trancher rationnellement entre les deux ?
Personnellement, je m'oppose à (b). J'ai tendance à penser que lorsque l'on est capable de se rendre conscient de ses biais, alors on est capable de les éviter (c'est pas toujours le cas, mais avec un peu d'effort, d'humilité, d’honnêteté, et d'éducation, on en est capable). Les féministes des sciences ont fait un travail louable pour dénoncer les biais androcentré dans les sciences. Mais je ne comprends pas pourquoi il serait impossible, même pour un homme, de se détacher de ces biais, une fois qu'on en a pris conscience. Pour en arriver à construire des théories aussi élaborées que celle de la physique quantique, on a du essuyer énormément de biais cognitifs, d'erreurs en tout genre, pourquoi en irait-il différemment pour les biais sexistes ?
Je ne pense pas que c'est en opposant à un discourt biaisé, un autre discourt partisan, que l'on parviendra à une science objective. Etre objectif, ce n'est pas rendre compte démocratiquement des différents points de vues pertinents qui respecteraient une certaine norme non sexiste et non raciste. Etre objectif, c'est rendre compte de la réalité telle qu'elle est, avec les moyens qu'on a. Et pour être objectif, toutes les critiques mettant en lumière des biais qui nous ferait nous tromper sur ce qu'est la réalité sont les bienvenues. Ce qu'il faut faire, c'est dénoncer les biais, et corriger notre jugement, non multiplier les points de vue, car la réalité, contrairement à nos représentations, n'est pas multiple. S'il n'est pas le cas que l'ovule est passif et que les spermatozoïdes seraient seuls actifs, alors ce n'est pas le cas, et les scientifiques qui serait dans le dénis face aux preuves n'ont pas de légitimité à l'être et leurs discourt n'a pas à recevoir de reconnaissance au nom de l'impossibilité de la neutralité. Notre sexisme nous a biaisé, on se corrige, on prends conscience de nos biais, on fait un travail sur soi, et on va de l'avant avec un regard plus objectif (je ne dis pas que c'est ce qui est fait, je dis que c'est ce qu'il faut faire).
Bien sur, je présuppose qu'il est possible d'être objectif malgré sa sociabilisation. Mais je ne sais pas trop quoi répondre à celles et ceux qui n'y croit pas. Si ce n'est : les premières féministes ont été éduquées dans une société patriarcale, elles ont reçu une sociabilisation qui présentait la domination masculine comme normale. Pourtant, elles ont réussis à comprendre l'ampleur et les mécanismes réels de l'oppression en se défaisant de ces biais intériorisés et hérités de leurs sociabilisations. Cette oppression, ce n'est pas un point de vue, c'est réel, et il a été tout à fait possible pour elles de se défaire de leurs biais afin de voir l'oppression en toute objectivité.
Génial ! mille merci !!!
Excellent comme toujours ! Merci !
En fait, la démarche épistémologique décrite ici peut se comprendre dans le cadre d'un "holisme de la confirmation" (thèse de Duhem Quine) : En science, les hypothèses ne sont jamais testées isolément mais "par groupe" (par exemple, en plongeant un thermomètre dans de l'huile en ébullition, on ne fait pas que tester la température d'ébullition de l'huile : On teste aussi le bon fonctionnement du thermomètre, la théorie électromagnétique qui permet de le faire fonctionner, le fait que le liquide soit bien de l'huile et pas du liquide vaisselle, etc...).
Or, identifier les hypothèses auxiliaires qui accompagnent la vérification d'une théorie n'est pas toujours évident et on peut tout à fait imaginer que certaines d'entre elles reposent sur des biais sexistes. Cela dit, comme cela a été relevé, j'imagine que les sciences touchant au social ou à la biologie y sont beaucoup plus sujettes que les autres.
Effectivement on peut envisager de lier l'épistémologie féministe à certaines thèses de l'épistémologie en générale. Mais je pense que la question du caractère politique de la formation des savoirs se trouve plutôt dans la sociologie des sciences :)
Merci pour votre intérêt pour mon travail !
@@GameOfHearth Oui, effectivement, je n'y avait pas pensé mais le caractère social du fonctionnement des institutions scientifiques est susceptible de jouer un rôle important également, ne serait ce que dans le choix des thématiques de recherche, par exemple...
Bonne continuation pour la chaine, elle est vraiment chouette. Ces thématiques sont un peu nouvelles pour moi et j'apprends plein de trucs... :-)
Super contenu. Merci
Génial! Merci beaucoup!
Merci ! Vraiment top
Merci pour cette vidéo !
Je n'ai pas réussi à saisir le nom de l'épistémologue (?) féministe citée à 17:17, est-ce que quelqu'un.e la connaîtrait svp ?
Cela me serait utile pour en apprendre plus !
(Elle ne me semble pas être indiquée dans la bibliographie.)
C'est Sandra Hardin :)
Bonjour,
Le discours de la vidéo, certainement dû à son format court, me laisse à penser qu'il y a une grande confusion entre Science et scientifiques, ainsi qu'entre chercheurs et pratiquants dans l'épistémologie féministes (notamment concernant l'exemple du gynécologue). Est-ce vraiment la méthode scientifique qui est critiquée (à savoir "l'expérimentation" de F. Bacon et la "réfutabilité" de K. Popper) ou la conclusion donnée aux résultats (la binarité naturelle des sexes par exemple)?
Car s'il est aisé de désigner les biais (cognitifs et facteurs confondants) de certaines disciplines scientifiques comme la Sociologie ou l'Histoire (biais normalement anticipés dans le protocole de l'étude), il me semble moins évident de les dégager dans les sciences dites dures.
Je vous félicite pour votre travail sur l'ensemble des vidéos, elles sont aussi passionnantes que rigoureuses.
Oui il faut entendre "science" ici non pas comme "méthode scientifique" dans le sens où vous l'entendez, mais comme "ensemble d'institutions situées dans le temps et l'espace". La métonymie était une facilité d'énonciation. Et en effet il y a des sciences qui tombent hors du champ de l'épistémologie féministe :)
Merci pour votre intérêt pour la chaîne!
Notez cependant qu'en ce qui concerne la "binarité naturelle sexes", la biologie ne tient pas/plus dans ce genre de discours. C'est même l'une des sciences qui a été le plus attaquée (à juste titre) par l'épistémologie féministe. Cest la manière dont la biologie du sexe est enseignée actuellement, de manière incomplète et caricaturale, qui pose encore problème. Je vous conseille sur ce sujet ma vidéo sur Thierry Hoquet, à propos de son ouvrage "Des sexes innombrables", qui explique la conception biologique du sexe.
@@GameOfHearth Il y a tout de même un point qui m'ennuie lorsque vous énoncez que la science argue découvrir la vérité. La science, si elle n'est pas objective, est la discipline la moins subjective que nous possédons, en ce qu'elle ne prétend pas ses théories vraies mais non réfutées pour le moment. Les scientifiques, appliquant la même méthode, peuvent donc être considérés comme les plus neutres dans leurs analyses.
Dans la réalité, on constate néanmoins que les conclusions ne tiennent pas compte toujours de ce principe de neutralité, mais les écarts sont atténués par le consensus scientifique. Une étude ne signifie rien. Elle n'acquiert une valeur qu'à l'intérieur d'une cohorte de recherches confirmant son résultat.
Mon exemple de la binarité sexuelle allait dans le sens de votre dernier message, à savoir une conclusion de recherches orientée. J'ai déjà visionné votre vidéo sur Thierry Hoquet (dont j’avais apprécié "Darwin contre Darwin : comment lire l'origine des espèces") qui est elle aussi très intéressante. D'ailleurs, cela illustre parfaitement que même si certaines institutions scientifiques (en l’espèce, l'American College of Pediatricians - les experts de l'argument du "naturel") nient la nuance de l'intersexualité, la science reste neutre en opposant des études antinomiques. L'épistémologie féministe prend effectivement tout son sens ici.
Enfin (et je me tais), la science est toujours très mal enseignée avec parfois 50 ans de retard sur l'état des connaissances actuelles. On apprend encore aux enfants que le modèle Newtonien de la Gravitation Universelle fonctionne, on qualifie toujours les rois francs mérovingiens de rois fainéants, voire on omet la contribution d'éminentes chercheuses telles qu'Emmy Noether en mathématique.
Bien sûr, mais le travail de l'épistémologie féministe va dans le sens de la réforme des sciences, pour de meilleures sciences, rien d'autre, c'est exactement comme vous dites, c'est simplement une orientation de la critique épistémologique parmi d'autres :)
(Par ailleurs, j'insiste : je fais de l'histoire des idées, je décris, je ne prescris pas, même si parfois je sais que je porte aussi mes opinions - qui ne doivent rester que cela).
Pour votre dernière remarque : oui, il y a toujours un retard dans l'enseignement, et c'est tout de même particulièrement pénible. Peut-être que ça l'est encore plus quand il s'agit, par exemple dans le cas de l'expression du dymorphisme sexuel, d'être mal (ou pas du tout) renseignés sur la diversité des corps humains qui nous entourent.
Si vous avez apprécié la vidéo sur l'ouvrage de Thierry Hoquet, vous serez peut-être satisfait d'apprendre qu'elle aura une suite, probablement vers le mois d'octobre!
@@GameOfHearth En tout cas, vous avez mis en lumière une partie de l'épistémologie dont j'ignorais les fondements. Je me cantonnais à une lecture ontologique très/ trop classique (biais de confirmation je suppose).
Il a effectivement des erreurs dans l’enseignement qui sont plus dommageables que d'autres. Personne n'est particulièrement affecté de penser la gravitation comme une force plutôt qu'une courbure de l'espace - temps. En revanche, croire qu'il existe une norme dans les séquences de gamètes, ou plus généralement une règle naturelle que l'on pourrait déduire de l'expression d'un phénotypage majoritaire, est le meilleur moyen d'angoisser les personnes aux extrémités du spectre.
Je regarderai avec plaisir la suite. J'espère à ce propos que vous obtiendrez d'ici là un nombre d'abonnés proportionnel à la qualité de votre travail (beaucoup beaucoup plus^^).
Bonjour,
Tout d'abord j'ai apprécié la vidéo, très claire par ailleurs.
Je me demandais s'il était possible d'avoir des approfondissement par rapport à la dernière personne que tu cites, critique envers le relativisme. Je ne suis pas sur d'avoir saisi tous les enjeux de l'aspect démocratique et ses limites.
Ok! Alors, un des problèmes que rencontre l'épistémologie féministe dans sa critique de la scientificité, c'est l'accusation de relativisme. Être relativiste, c'est dire que tous les points de vue sont également valables, puisque de toute manière on a affirmé que la science est produite depuis des points de vue, qu'il n'y a pas d'observateur neutre. Mais du coup, ça ouvre la porte à tout un tas de points de vue, d'options politiques dont on ne veut pas (à raison) entendre parler - pour aller dans ce qu'on fait de pire, disons le nazisme. Ce que dit Sandra Harding, c'est que non, l'épistémologie féministe ne mène pas à un dangereux relativisme qui accepterait toutes les idéologies politiques comme étant de bons points de départ des sciences. D'où son affirmation que l'épistémologie féministe doit/est politiquement engagée dans la production d'une science démocratique, c'est-à-dire ouverte, dévoilant ses travaux, mais également refusant certaines positions en ce qu'elles sont discriminantes (le racisme et le sexisme en l'occurrence, sont citées par Harding). Ce qui compte avec une épistémologie du standpoint, c'est d'ouvrir les sciences, sans que ça soit synonyme de rationalisation de la haine d'autrui, ou d'investissement des sciences par un pouvoir fascisant. Dire qu'on fait de la science avec un objectif politique, ça n'est pas accepter que toutes les politiques soient également dignes pour mener la science.
Dis-moi si c'est plus clair ou s'il y a encore des points obscurs :)
Merci pour ton éclaircisement. Disons que c'est un peu plus clair, mais par ex. je sais que chez des scientifiques, la résistance à l'ouverture démocratique de la science se fait sur des arguments récurent : le 1er c'est de dire que 1+1=2 n'est pas une décision démocratique, mais le fruit de la science, sous-entendu, de ce que j'en comprend, que toute les propositions scientifique ne sont pas par essence discutable, mais que p.ê seule certaines puissent l'être.
Par ailleurs l'autre opposition que j'ai rencontré récemment, c'est que la société civile est considéré, tout comme les industriels comme un lobby. Ils le mettent au même niveau. En général ce que je répond dans ce cas la, c'est que l'on pourrait dire la même chose de l'Etat, mais ça ne les convainct pas vraiment.
Enfin, le plus obvious, c'est qu'on nous reproche le lyssenkisme, c'est à dire une science orienté politiquement, mais qui était plus idéologique que fonctionnelle. En général dans ce cas là, j'essaye de bien montré la distinction entre science et technique.
Oui en effet, la question politique est à mon avis à croiser avec la question de savoir de quelle science il s'agit, de même que dans quelle société démocratique nous trouvons-nous (ou pas). Je pense qu'on peut dire que les épistémologies féministes ne sont pas applicables en l'état, ni ne sont une programmatique de recherche unifiée. L'épistémologie féministe tend à se développer ostensiblement dans les disciplines où c'est possible, notamment le plus évident: les sciences humaines et la biologie. Work in progress :)
@@GameOfHearth bonjour, je ne vois cette vidéo qu'aujourd'hui. Très intéressante, évidemment, j'avais déjà vu et compris (disons dans les grandes lignes en tout cas !) ailleurs les problématiques du positionnement mais il y a dans votre vidéo ce point sur le relativisme - c'est pourquoi je réponds en réponse à ce commentaire - qui mériterai peut être d'être creusé (peut être l'avez vous fait ailleurs auquel cas pardon pour ce commentaire inutile) :
Vous citez comme opposition au fait que ce serait relativiste l'idée que ce qui serait plus valable en science serait une science non sexiste, non raciste, démocratique.
Ça semble une évidence, et en même temps la connotation très militante et politisée des termes est un cache misère pratique à ceux qui se défendent d'avoir des biais car il seraient non militants et apolitiques. J'imagine que la philosophie des sciences, et les personnes que vous citez sur le sujet, ont travaillé plus en profondeur sur ce sujet qu'un simple "si c'est démocratique ce sera une meilleure science" et je serais très intéressé personnellement par de la vulgarisation sur ce point ( si ça rentre dans le champ de votre chaîne évidemment !). On lit souvent à propos de la science qu'elle n'est justement pas démocratique (puisqu'on ne vote pas/toutes les voix ne se valent pas), avec je pense un flou et une confusion similaire à ce qu'on peut lire à propos d'un féminisme qui serait contre les hommes ou une sciences féministe qui serait, puisque militante, nécessairement biaisée.
Je ne sais pas si je suis clair :D
Merci et bravo pour votre travail
@@bugin4709 Bonjour, je réagis au 1+1=2: Ce n'est ni une décision démocratique, ni le fruit de la science. C'est une convention, comme le mètre ou le kilogramme. Pour le plaisir: la BD Logicomix nous plonge dans l'aventure de deux mathématiciens qui tentent de fonder 1+1=2 "scientifiquement", je la recommande.
La vidéo est bien montée est intéressante.
Je trouve qu'il y a beaucoup d'erreur de raisonnement, de raccourcis et de biais qui font perdre a beaucoup des points étudiés leur pertinence.
Notez qu'il s'agit d'une vidéo de vulgarisation, et qu'elle est forcément incomplète par rapport à la montagne de papiers universitaires qu'il est question de résumer ici :) Pour vous faire une idée plus exhaustive des thématiques abordées, vous pouvez aller voir en la bibliographie en barre d'info.
Merci
Salut, je trouve rien de bien pertinent sur Sazan Sax... t'aurais des liens ou des texte stp?
Suzan Saxe, tu veux dire?
Est-ce que l'épistémologie féministe s'intéresse aussi aux sciences autres que sciences humaines?
Oui :) Pour des exemples tu peux regarder la vidéo sur Priscille Touraille, et celle avec Thomas Crespo ("Les féministes sont-elles biophobes" - les deux sont surtout axées sur la biologie.
12:10 : Ce n'est valable que pour les hommes qui vivent en couple (qui plus est hétérosexuel), non ?
C'est aussi valable pour celles et ceux qui paient un service pour le ménage, etc.
ça m'a fait penser à: un petit billet d'un prof de SES qui distingue l'objectivité et la neutralité: uneheuredepeine.blogspot.com/2014/03/avoir-un-point-de-vue-ca-narrive-pas.html et une réflexion d'une chercheuse, Noémie Marignier, critiquant l'injonction à se situer...mais d'un point de vue situé^^ reflexivites.hypotheses.org/5967 plus précisément, c'est l'idée que se dire situé n'équivaut pas à une véritable prise en compte de sa position qui modifierait le discours que l'on tient sur son objet. Une absence de réflexivité sur cette question, et l'idée aussi que, n'étant pas transparents à nous-mêmes, nous méconnaissons parfois en quoi nous nous trouvons "situés" par rapport à ce qu'on étudie (elle prend l'exemple de sa propre recherche sur les personnes intersexes
Ce sont des questions importantes pour les sciences humaines (comme en témoignent ces billets, qui sont la partie émergée de l'iceberg en fait), mais aussi pour les sciences en général. On trouve à ce propos, dans chaque discipline, des kilomètres de papiers universitaires :) Merci pour les références !
Très bonne vidéo encore une fois , ça m'a rappelé cette vidéo th-cam.com/video/sA_mMdcmCJQ/w-d-xo.html qui se concentrait sur le pourquoi du faible nombre de femme travaillant dans les sciences ^^
Sinon j'aurais une question sur comment s'articule l'épistémologie féministe avec les sciences qui n'étudient pas l'homme en direct, je prends un exemple caricatural , mais me dire que le fait que la Terre soit ronde (on pourrait être plus précis bien sûr) soit découvert par Aristote un homme grec , je ne vois pas en quoi ça change ce fait, et donc comment par extension comment l'épistémologie féministe traite la physique , la chimie , la géologie et d'autres sciences qui n'étudient pas l'homme ?
Ou alors l'épistémologie féministe pour les sciences qui n'ont pas pour sujet l'homme vont plutôt se concentrer sur comment faire pour que les femmes soient reconnues et pas invisibilisées par les hommes ?
je commente pour suivre la réponse :)
Merci pour ta question ! Du coup, les épistémologies féministes se sont d’abord intéressées aux sciences humaines, puis aux sciences bio-médicales. Ce qu’il faut savoir, c’est que si le courant de pensée à peiné à traverser l’Atlantique (pour arriver en France indeed), c’est précisément parce que les chercheuses françaises ont trouvé que c’était des épistémologies trop générales, trop englobantes par rapport à la diversité des pratiques et des sujets d’études des sciences. Du coup ça faisait rester cette épistémologie dans le sphère de la réflexion philosophique, et l’application en termes de pratiques scientifiques restait marginale. Et bien sûr d’intenses discussions autour de cette critique.
D’ailleurs, un des conflits « en interne » des épistémologies féministes a été celui qui tourne autour de la volonté de partir d’expérience concrètes, de ne jamais oublier ce point de départ matérialiste, très ancré dans les pratiques, qui a été à l’origine des épistémologies féministes. En effet, il se trouve que les universitaires théorisant l’épistémologie n’étaient pas les mieux placées pour parler de « pratiques », précisément. Du coup on voit mal, si on suit ce point de départ des pratiques, comment on pourrait aller jusqu’à causer mathématiques ou physique avec l’épistémologie féministe - à part bien sûr par un travail sur la mixité dans les labo.
Alors, comment ça se passe, ce fameux "saut" entre "les sciences" et "les sciences qui parlent des humains" : Maria Puig de la Bellacasa (« Politiques féministes et construction des savoirs ») s’appuie sur Stengers (une épistémologue qui ne s’inscrit qu’épisodiquement dans la tradition de pensée féministe) pour expliciter le passage du dispositif expérimental pour observer « les faits » de manière abstraite qu’a mis en place Galilée avec le plan incliné, à la généralisation de ce dispositif dans toutes les sciences. En gros on a la généralisation d’un processus extrêmement particulier et situé (le dispositif expérimental construit qui tente d’isoler des phénomènes pour en tirer les lois universelles de la nature, comme par exemple la loi de l’attraction terrestre), et cette généralisation devient une manière de discriminer entre ce qui peut être considéré comme de la science et ce qui ne peut pas l’être. C’est cette généralisation du même modèle de scientificité qui est questionné par les épistémologies féministes, et qui font qu’elles parlent « des sciences » en généralisant, et non pas toujours « des sciences » en entrant dans les méthodologies multiples.
Du coup, la critique porte sur la généralisation peu scrupuleuse de la prétention à l’objectivité d’un certain modèle pour faire de la science. Cette généralisation se fait avec une certaine autorité, qui n’est pas questionnée, malgré le fait qu’il y a une « diversité des rapports au monde et [une] multiplicité de types de réalité. » p.143 Et donc pour Anne Fausto-Sterling (biologiste), reformulée par M.P.dlB : « Il y aurait un modèle de science, la pensée scientifique occidentale, qui a des atouts importants pour certains types de réalité et, aussi, il y a des sciences qui s’adressent à différentes réalités, le comportement social complexe par exemple - et même aussi à une grande partie de la biologie cellulaire. » p.143 Donc il y a certains phénomènes et certaines sciences qui les étudient, qui ne sauraient être apolitiques, se considérer comme non situées. La généralisation du modèle expérimentale à la Galilée ne marche pas toujours.
Pour résumer : est critiquée l’uniformisation de la méthode scientifique qui prétend à l’objectivité par un dispositif d’observation abstrait. De ce côté là, l’épistémologie féministe est une épistémologie critique qui n’a de lien avec le féminisme que son point de départ, qui l’a menée à la critique de l’abstraction à prétention objectiviste. Ce qui particularise l’épistémologie féministe, c’est ce qui se manifeste au sein des sciences prises une à une.
@@GameOfHearth Merci beaucoup pour la qualité de ta réponse, elle mérite d'être profondément méditée...
J'aurais une question subsidiaire, est-ce que les sciences plus abstraites comme les mathématiques ou l'informatique souffrent de ce biais de généralisation quand elles ne sont pas la plupart du temps basées sur l'observation ?
@@josephlemoucque827 haha là pour le coup c'est complètement hors de mes compétences ^^ je pense qu'il faut aller voir vers l'épistémologie de ces disciplines plus précisément ;)
@@GameOfHearth Merci :)
Je n'ai pas vraiment entendu parler dans ta vidéo de la distinction entre la neutralité et l'objectivité. Ou plutôt, dans un seul sens. Tu démontes, à juste titre, l'idée qu'il existerait une neutralité préalable, et que par conséquent, on ne peut pas se croire objectif en s'appuyant sur notre prétendue (et fausse, illusoire) neutralité.
Mais il me semble que ça contourne une question fondamentale, qui est celle de la chronologie. Tu pars du principe que l'on a une opinion initiale, et que l'on chercherait à la confirmer avec les sciences. C'est effectivement l'argument que beaucoup de gens utilisent à tort contre les scientifiques militants, et je comprends la nécessité de le démonter. Mais il me semble que tu oublies la possibilité chronologique inverse, à savoir que l'on soit militant, ou du moins autrement militant, en raison des sciences. C'est-à-dire que l'avancée de la recherche nous fasse précisément devenir militant/autrement militant. Dans ce cas, c'est l'engagement qui découle de l'objectivité, et non l'inverse. Ainsi, la question de neutralité-objectivité est caduque si la chronologie est inversée. Ce qui ne signifie pas qu'elle le soit toujours.
Je n'ai hélas pas encore lu tes références bibliographiques, quoique j'ai Donna Haraway qui m'attende. Donc j'ignore si cette possibilité est déjà prise en compte dans leurs ouvrages, car ce pourrait tout autant être un choix de ta part que de proposer une vidéo courte, et de répondre seulement aux accusations majeures. Quoi qu'il en soit, je tenais à partager cette nuance qui augmente ton propos plus qu'il ne le contredit. Je viens de découvrir ta chaîne et je suis extrêmement content du contenu que tu proposes. (Tu peux remercier le groupe "écoutes anarchistes"). Bonne continuation.
Bonjour et merci pour ton intérêt pour la chaîne! Pour répondre à ta question, déjà une chose : je présente une branche de la recherche universitaire, en aucun cas je ne prends pour moi les discours que j'explique. L'exposition de mes opinions n'est pas mon but.
Ensuite pour rentrer dans le vif de ta question: il n'est pas vraiment question, dans l'épistémologie féministe, d'un militantisme sexiste conscientisé qui s'exprimerait à travers la manipulation de la science. La notion de "point de vue" est crucial en ce sens: nier avoir un point de vue d'où l'on parle, ça n'est pas forcément être politiquement de mauvaise foi pour cacher un agenda. On peut être sexiste en l'ignorant: en prendre conscience nécessite une fréquentation intellectuelle des concepts féministes ou anti-sexistes. On peut, par la suite, refuser l'idée d'avoir un point de vue, ou trouver que les idées de notre point de vue sont plus légitimes que celles des autres. Mais c'est déjà dans l'idée qu'une dénonciation a été faite sur le caractère situé d'une production de connaissance.
Par conséquent, ce que dira l'épistémologie féministe, c'est qu'il n'y a pas de point de vue neutre (enfin, ça, c'est pour l'épistémologie féministe plus récente, qui radicalise sa critique de la scientificité), et que toute production scientifique est marquée par un point de vue, que les scientifiques le veuillent ou non. Par conséquent, qu'une connaissance scientifique mène à du militantisme dans un second temps n'annule aucunement le point de vue de départ, non conscientisé.
Dis-moi si ça n'est pas clair :)
@@GameOfHearth Je ne sais pas si "c'est clair", mais du moins, j'ai compris ce que tu voulais dire. Nous sommes tout à fait d'accord sur la question de la nécessité de prendre en compte la présence de dogmes implantés en nous malgré qu'on en ait. Les apolitiques sont toujours politiques à leur insu. Il est vrai que la question de la conscientisation me paraît essentielle pour compléter ton propos.
En ce qui me concerne, je viens du féminisme par le militantisme, et de l'épistémologie par ma formation universitaire, donc j'ai deux origines différentes pour ces questions. Et c'est vrai que ma remarque porte plus sur une question d'épistémologie générale, dans le sens où, hors du milieu de la recherche, les gens ne comprennent guère ce que nous faisons, et sont persuadés de l'incompatibilité entre engagement et objectivité. À vrai dire, tu as raison de dire que "quoi qu'il en soit, la neutralité n'existe pas". La question de l'inversion causale sert plus à répondre à des gens "non-politisables" qui nieraient la prémisse que tu poses.
Merci pour ta réponse, et bonne continuation.