Merci pour vos explications qui répondent parfaitement à mon interrogation : je n’avais jamais fait attention à cette distinction et je me mélangeais les pinceaux avant de vous écouter sur You Tube (pour ma part je ne suis pas bien sûr d’arriver à penser le « rien » ou le « néant » …si ce n’est pour dire qu’il n’y a rien dans cette pièce, par exemple, ce rien se limitant à ce que je pensais y trouver, : ) ). Je vais maintenant m’accrocher à votre cours sur Aristote, et dans la mesure de mes moyens, chercher à progresser dans ma compréhension de la philo grâce à vous. J’ai le projet ensuite de suivre vos autres cours : il me reste donc du grain à moudre, et j’en suis heureux. Amicalement et à bientôt sur You Tube, même si c’est en différé… PS : mais votre réponse était bien un « direct ». Chapeau d’assurer ce suivi ! Je suis vraiment très admiratif pour ce que vous faites. Patrick
J'avais déjà lu le Sophiste sans vraiment être arrivé à le comprendre, j'au aussi lu le cours de Heidegger sur le Sophiste sans être arrivé à saisir les nuances non plus. En écoutant votre cours attentivement trois fois, j'ai réussi enfin à saisir la clé, que l'idée de "l'autre", qu'une forme est "autre" que telle autre forme, qu'elle "n'est pas" celle-là, introduit un "non-être" qui n'est pas le non-être comme néant, mais comme différence. J'ai aussi compris que pour ce Platon tardif, l'être ne serait plus réservé aux seules idées, mais aussi aux corps matériels qui agissent et pâtissent. D'où il me semble que la différence scolaire qu'on apprend entre Platon (être comme idées) et Aristote (être comme substances principalement matérielles) est à nuancer. Peut-être que Platon âgé a justement évolué dans le Sophiste à force de discuter avec Aristote à l'Académie ?
3 ปีที่แล้ว
Oui, c'est en effet une hypothèse très tentante, que la pensée de Platon ait évolué grâce aux échanges au sein de l'Académie, en particulier avec Aristote. Il reste néanmoins la difficulté que, dans ses toutes dernières oeuvres, le Timée et les Lois, Platon réaffirme ses thèses ontologiques de la République, ignorant leur mise en question dans le Sophiste et le Parménide. Peut-être est-il lui-même partagé entre ses exigences intellectuelles, qui le poussent à n'affirmer que ce qui est conceptuellement irréfutable, et ses exigences morales et religieuses qui le font aspirer à un fondement absolu des hiérarchies. En tout cas je me réjouis que vous soyez parvenu à la bonne compréhension de ce texte difficile. Bonne continuation!
c'est plus compréhensible d'écouter vos cours ,plutôt que de les regarder (et cela ne vient pas de vous);Mais vue que vous êtes parfaitement compréhensible (et généreuse dans votre travail)on est bien branché à votre voie , et l'intellect ne cherche pas l’œil pour l'aider à comprendre ce que vous voulez dire Je sais dorénavant,où renvoyer les misogynes(même s'il y en a peut être moins que des misandre aujourd'hui en france),pour leurs faire honte..... Merci !
8 ปีที่แล้ว +1
A chacun son mode d'accès! Merci et bonne écoute! AS
Bonjour, Merci pour tous ces cours que vous mettez à la disposition de tous c'est vraiment rès enrichissant. Pour ma part je ne parviens pas bien à voir l'évolution de la justice et de l'éthique à travers les différentes périodes de l'oeuvre de Platon. Pouvez-vous m'indiquer le fil conducteur ? Merci d'avance Henri
6 ปีที่แล้ว +2
Bonjour, et merci pour cette question importante. Dans la première période, socratique, les définitions traditionnelles des vertus sont mises à l'épreuve et se révèlent toutes insuffisantes ou contradictoires, mais il n'y a pas de proposition positive. Dans la période de la maturité, et surtout dans la République, les notions morales sont théorisées comme des idées, c'est-à-dire comme des intelligibles existant par soi indépendamment des humains, éternelles et possédant toujours le même être. Il s'ensuit que, pour agir bien, il faut d'abord connaître théoriquement ce qu'est l'idée de Bien. Or, c'est une connaissance extrêmement difficile à atteindre, et seul les très bons philosophes experts en dialectique peuvent y parvenir. C'est pourquoi, il faudrait confier à ces philosophes le soin d'édicter les lois qui appliqueront correctement l'idée de Bien à tous les cas particuliers concrets. Parmi les dialogues de vieillesse, dans Les Lois Platon réalise ce type d'application, mais le Philèbe est beaucoup plus intéressant parce qu'il y pense le bien comme la fin (le but) auquel tous les hommes aspirent, de sorte qu'il s'identifie à la vie la plus heureuse, et les autres notions qui interviennent dans la morale (le plaisir, la mesure, la réflexion,...) sont pensées en fonction de leur contribution à ce but. Il en résulte une proposition de conduite de sa propre vie que chacun est capable de juger et de réaliser pour lui-même, annonçant déjà l'approche pratique d'Aristote dans ses Ethiques. En ce qui concerne plus particulièrement la justice, dans le dialogue encore socratique Gorgias, l'incitation à être juste ne repose pas encore sur une définition précise; c'est dans la République que la justice est définie comme l'accomplissement par chacun de sa fonction propre, soit au niveau politique de l'organisation de la cité, soit au niveau de l'âme individuelle dans la relation correcte entre les parties désirantes et la partie dirigeante. Cette définition ne sera pas mise en question par la suite. N'hésitez pas à m'en demander plus si nécessaire. Bien cordialement, Annick.
Bonsoir Annick, deux petites remarques ce soir. La première, maladroite très probablement, interroge la posture « ontologique » sophistique. En faite je me demandais si les Sophistes, de la même façon que dans la pensée taoïste (du peu que j'en entrevois), n'admettent-ils pas que la vérité, en tant que réalité ontologique ou métaphysique (je ne sais pas quel est le terme plus approprié ici) n'existe tout simplement pas...? La remarque est ardue à concevoir et il est difficile de l'exprimer je trouve, tant cela déborde largement de notre cadre « cognitif ». Il faut se plier à une autre ontologie que la nôtre (le problème se situe donc au-delà des seules conditions d'accessibilité à la vérité). Car dans cette vision, telle qu'elle pourrait soutenir les considérations des Sophistes, tout est perpétuellement ambivalence et si une vérité autre que l'ambivalence existerait quelque part alors elle serait toujours éminemment relative. Relative à un point de vue, à un contexte, à des compétences, à un paradigme, à une cosmologie, etc, etc. Bref mais elle ne dirait absolument rien du Tout, dans sa globalité, dans son équilibre, dans son harmonie. Car seul compte et existe vraiment ce Tout, caractérisé par cette éternelle dualité, cette ambivalence, figurée par le Yin et le Yang. Aussi, une connaissance plus adaptée, plus pertinente doit se porter au niveau du Tout (qui ne doit pas être entendu comme une vérité donc mais comme un état d'équilibre des contraires) et s'inscrire dans la compréhension de ce Tout. C'est à ce niveau qu'il faut déployer la connaissance. Aussi, dans ce sens on pourrait dire, en extrapolant certes, qu'une connaissance se doit d'être efficace plus que vraie car efficace elle est un chemin, parmi d'autres, œuvrant au sein de l'harmonie du Tout, tandis que cherchant le vrai, elle ne serait qu'une chimère. Ce n'est pas évident à exprimer, surtout que je le comprends moi-même difficilement. Mais au fond, j'ai l'impression qu'il y aurait peut-être un vrai positionnement ontologique, proche de celui qui sous-tend la philosophie taoïste (que j'entrevois très vaguement encore une fois), qui pourrait tout à fait « soutenir » la posture philosophique des Sophistes. Vous semble-t-il possible que la pensée des Sophistes ait pu être sensible à une pareille ontologie et inspirée par quelque chose d'apparenté ? En faite, je crois en la sincérité de l'acteur à l'égard de son propre discours et, pensant que ce devait être le cas chez les Sophistes aussi, j'essaie de situer cette sincérité chez eux.... Deuxième remarque, je ne sais pas où j'ai déraillé mais quelque chose m'échappe dans le raisonnement spéculatif et abstrait de Platon. Si l'on pose quelque chose qui Est, c'est bien qu'on cherche à le définir dans ce qu'il est et non pas dans ce qu'il n'est pas sinon ça n'a aucun sens de poser que quelque chose est ? D'autre part si l'on suit la logique abstraite et spéculative de Platon qui dit que quelque chose qui EST n'est pas en même temps ce qu'il n'est pas et donc être et non-être sont possibles.... alors, allons plus loin cher Platon, quelque chose qui n'est pas, si l'on suit cette logique, cette chose EST également de ne pas être ce qu'elle n'est pas. Ainsi « ne pas être quelque chose » c'est d'abord « être cette autre chose qui s'exprime par la négation » et qui est le fait de ne pas être. En conséquence dans ce raisonnement, être prime toujours sur non-être. Et dans cette logique spéculative et abstraite, on aurait beau jeu d'aboutir à une autre conclusion : le discours ontologique de Parménide n'avait pas besoin de correction platonicienne ! En fait, « être » est une convention qu'on ne peut pas court-circuiter impunément si ce n'est en créant moultes paradoxes... ?? Donc ma remarque est la suivante : devons-nous comprendre que cette spéculation dialectique de Platon est permise soit parce qu'il introduit une nouvelle dimension à Etre que celle qu'envisage Parménide (chez Platon, être signifie « qui possède l'attribution de », alors que chez Parménide être reste cantonner au sens « exister ») ? Soit parce que le statut ontologique des idées platoniciennes, qui existent en elles-même indépendamment de nos pensées, permet de court-circuiter le caractère « conventionnel » de l'idée d'Etre ? Ou alors cette dialectique est-elle permise par ces deux conditions à la fois ??? Ou alors je me suis perdu...J'en ai peur parfois.... Merci de m'avoir lu jusqu'au bout Annick, au plaisir !! Bien cordialement
2 ปีที่แล้ว
Bonjour Emilien, voici des réponses qui demanderaient bien d'autres développements, impossibles ici: - Pour les Grecs en général, la vérité est un discours, pas une réalité: c'est le discours qui dit les choses telles qu'elles sont. On peut donc douter qu'il existe une vérité, c'est-à-dire qu'un discours puisse dire exactement ce que sont les choses, mais personne ne dit qu'il n'existe aucune réalité. Ce que vous dites de la pensée taoïste n'est dès lors pas très différent car il s'agit de rectifier la manière dont on pense arriver au discours vrai, c'est-à-dire correspondant au Tout. La question reste bien sûr de savoir sur quoi s'appuie la doctrine pour affirmer ce Tout et cette complémentarité des contraires. - Quant au raisonnement de Platon dans le Parménide, ce qu'il pose au départ n'est pas "ce qui est" mais "l'un". C'est à son propos qu'on peut dire a priori ou bien qu'il est (ce qui entraîne immédiatement la correction qu'il n'est pas absolument un, puisqu'on doit distinguer "un" et "être"), ou bien qu'il n'est pas (ce qui est plus cohérent avec le fait qu'il est absolument un, mais qui ne permet d'affirmer rien d'autre). En rejetant cette hypothèse, Platon veut probablement montrer qu'il est impossible de poser n'importe quel concept sans poser aussi le concept d' "être". Celui-ci a donc bien son sens habituel d'exister, incluant tous les types d'existence possibles.
@ Super, merci Annick! Ces réponses me nourrissent très largement et rectifient quelques erreurs d'appréciation de ma part. Je vais remâcher tout ça! Merci beaucoup, au plaisir!!
le travail du philosophe est il de créer des concepts ?
8 ปีที่แล้ว
C'est ce que dit Deleuze dans Qu'est-ce que la philosophie? Selon le sens qu'on donne à "concept", on dira que le concept est un outil pour faire avancer la pensée et la compréhension, ou bien qu'il est la pensée elle-même, son mouvement et non son résultat. En tous cas, oui, le concept est proprement l'oeuvre philosophique, qui se distingue de toutes les autres sortes de notions, y compris des notions scientifiques, parce qu'il n'est pas simplement la généralisation de cas particuliers observables ou le résultat de déductions logiques. Deleuze en donne de bons exemples au début de son livre, et ça vaut la peine de s'accrocher pour lire ces premières pages même si elles sont plutôt ardues.
il me semble que le 'concept' nous éloigne de la "réalité" en voulant faire du multiple UN, je suis aussi fan de François Jullien qui a fait une conférence sur ce sujet et qui fait le (un ?) point sur ce sujet, vos conférences sont passionnantes et très claires, si vous êtes A.S. ... Université Populaire de Marseille
8 ปีที่แล้ว +1
Si tout ce qui unifie une multiplicité nous éloigne de la réalité, alors le langage le fait en premier lieu, puisqu'on est obligé d'utiliser le même mot des millions de fois pour des choses irréductiblement différentes... C'est une nécessité à accepter, à moins de faire comme ce disciple de Cratyle (mentionné par Platon) qui ne voulait plus parler mais se contentait de désigner du doigt pour atteindre le singulier. Mais même comme ça on est encore dans la confusion puisqu'on ne sait pas si ce qui est désigné est la couleur, la forme, l'expression, ou n'importe quelle autre caractéristique de la chose désignée. Non, vraiment, on a besoin du langage et donc des notions qui sont signifiées par les mots. Cela dit, le concept est plus que la notion, comme je l'ai écrit. Et, par ailleurs, unifier ne signifie pas oublier ou gommer qu'il s'agit d'une multiplicité; on peut passer de la perspective générale à la perspective singulière et vice-versa selon les besoins. Merci pour vos commentaires. Annick
l(idée ou la notion de Rien n'a donc aucune réalité...c'est la seule notion ?
7 ปีที่แล้ว +2
Vous avez raison d'insister de cette façon, pour éviter toute formulation imprécise. Ce n'est pas que la notion de "rien" n'ait aucune réalité, c'est qu'elle n'a de réalité que la négation de toutes les autres. Elle n'a aucune définition positive, aucune propriété ou caractéristique par elle-même, sauf l'exclusion de tout. Elle est donc quelque chose de pensable, mais seulement indirectement et non par soi. C'est pourquoi, pour Platon, elle n'est pas une idée, qui doit être une essence déterminée par elle-même. La différence entre le "rien" et le "non-être", c'est que celui-ci peut être la négation de n'importe quelle notion/idée sans être la négation de toutes à la fois (y compris quand il est la négation de l'idée "être", il n'est pas du même coup la négation de toutes les idées). Fascinant, non? :-) Merci et à bientôt, Annick
Merci pour vos explications qui répondent parfaitement à mon interrogation : je n’avais jamais fait attention à cette distinction et je me mélangeais les pinceaux avant de vous écouter sur You Tube (pour ma part je ne suis pas bien sûr d’arriver à penser le « rien » ou le « néant » …si ce n’est pour dire qu’il n’y a rien dans cette pièce, par exemple, ce rien se limitant à ce que je pensais y trouver, : ) ). Je vais maintenant m’accrocher à votre cours sur Aristote, et dans la mesure de mes moyens, chercher à progresser dans ma compréhension de la philo grâce à vous. J’ai le projet ensuite de suivre vos autres cours : il me reste donc du grain à moudre, et j’en suis heureux. Amicalement et à bientôt sur You Tube, même si c’est en différé…
PS : mais votre réponse était bien un « direct ». Chapeau d’assurer ce suivi ! Je suis vraiment très admiratif pour ce que vous faites.
Patrick
J'avais déjà lu le Sophiste sans vraiment être arrivé à le comprendre, j'au aussi lu le cours de Heidegger sur le Sophiste sans être arrivé à saisir les nuances non plus. En écoutant votre cours attentivement trois fois, j'ai réussi enfin à saisir la clé, que l'idée de "l'autre", qu'une forme est "autre" que telle autre forme, qu'elle "n'est pas" celle-là, introduit un "non-être" qui n'est pas le non-être comme néant, mais comme différence.
J'ai aussi compris que pour ce Platon tardif, l'être ne serait plus réservé aux seules idées, mais aussi aux corps matériels qui agissent et pâtissent. D'où il me semble que la différence scolaire qu'on apprend entre Platon (être comme idées) et Aristote (être comme substances principalement matérielles) est à nuancer. Peut-être que Platon âgé a justement évolué dans le Sophiste à force de discuter avec Aristote à l'Académie ?
Oui, c'est en effet une hypothèse très tentante, que la pensée de Platon ait évolué grâce aux échanges au sein de l'Académie, en particulier avec Aristote. Il reste néanmoins la difficulté que, dans ses toutes dernières oeuvres, le Timée et les Lois, Platon réaffirme ses thèses ontologiques de la République, ignorant leur mise en question dans le Sophiste et le Parménide. Peut-être est-il lui-même partagé entre ses exigences intellectuelles, qui le poussent à n'affirmer que ce qui est conceptuellement irréfutable, et ses exigences morales et religieuses qui le font aspirer à un fondement absolu des hiérarchies. En tout cas je me réjouis que vous soyez parvenu à la bonne compréhension de ce texte difficile.
Bonne continuation!
Merci beaucoup madame
c'est plus compréhensible d'écouter vos cours ,plutôt que de les regarder (et cela ne vient pas de vous);Mais vue que vous êtes parfaitement compréhensible (et généreuse dans votre travail)on est bien branché à votre voie , et l'intellect ne cherche pas l’œil pour l'aider à comprendre ce que vous voulez dire
Je sais dorénavant,où renvoyer les misogynes(même s'il y en a peut être moins que des misandre aujourd'hui en france),pour leurs faire honte.....
Merci !
A chacun son mode d'accès!
Merci et bonne écoute!
AS
Merci,
Depuis que j'ai découvert, vos conférences, cad depuis deux jours, je n'ai pu me détacher de votre écoute.
Bonjour,
Merci pour tous ces cours que vous mettez à la disposition de tous c'est vraiment rès enrichissant.
Pour ma part je ne parviens pas bien à voir l'évolution de la justice et de l'éthique à travers les différentes périodes de l'oeuvre de Platon. Pouvez-vous m'indiquer le fil conducteur ?
Merci d'avance
Henri
Bonjour, et merci pour cette question importante.
Dans la première période, socratique, les définitions traditionnelles des vertus sont mises à l'épreuve et se révèlent toutes insuffisantes ou contradictoires, mais il n'y a pas de proposition positive. Dans la période de la maturité, et surtout dans la République, les notions morales sont théorisées comme des idées, c'est-à-dire comme des intelligibles existant par soi indépendamment des humains, éternelles et possédant toujours le même être. Il s'ensuit que, pour agir bien, il faut d'abord connaître théoriquement ce qu'est l'idée de Bien. Or, c'est une connaissance extrêmement difficile à atteindre, et seul les très bons philosophes experts en dialectique peuvent y parvenir. C'est pourquoi, il faudrait confier à ces philosophes le soin d'édicter les lois qui appliqueront correctement l'idée de Bien à tous les cas particuliers concrets. Parmi les dialogues de vieillesse, dans Les Lois Platon réalise ce type d'application, mais le Philèbe est beaucoup plus intéressant parce qu'il y pense le bien comme la fin (le but) auquel tous les hommes aspirent, de sorte qu'il s'identifie à la vie la plus heureuse, et les autres notions qui interviennent dans la morale (le plaisir, la mesure, la réflexion,...) sont pensées en fonction de leur contribution à ce but. Il en résulte une proposition de conduite de sa propre vie que chacun est capable de juger et de réaliser pour lui-même, annonçant déjà l'approche pratique d'Aristote dans ses Ethiques.
En ce qui concerne plus particulièrement la justice, dans le dialogue encore socratique Gorgias, l'incitation à être juste ne repose pas encore sur une définition précise; c'est dans la République que la justice est définie comme l'accomplissement par chacun de sa fonction propre, soit au niveau politique de l'organisation de la cité, soit au niveau de l'âme individuelle dans la relation correcte entre les parties désirantes et la partie dirigeante. Cette définition ne sera pas mise en question par la suite.
N'hésitez pas à m'en demander plus si nécessaire.
Bien cordialement, Annick.
Bonsoir Annick, deux petites remarques ce soir. La première, maladroite très probablement, interroge la posture « ontologique » sophistique. En faite je me demandais si les Sophistes, de la même façon que dans la pensée taoïste (du peu que j'en entrevois), n'admettent-ils pas que la vérité, en tant que réalité ontologique ou métaphysique (je ne sais pas quel est le terme plus approprié ici) n'existe tout simplement pas...? La remarque est ardue à concevoir et il est difficile de l'exprimer je trouve, tant cela déborde largement de notre cadre « cognitif ». Il faut se plier à une autre ontologie que la nôtre (le problème se situe donc au-delà des seules conditions d'accessibilité à la vérité). Car dans cette vision, telle qu'elle pourrait soutenir les considérations des Sophistes, tout est perpétuellement ambivalence et si une vérité autre que l'ambivalence existerait quelque part alors elle serait toujours éminemment relative. Relative à un point de vue, à un contexte, à des compétences, à un paradigme, à une cosmologie, etc, etc. Bref mais elle ne dirait absolument rien du Tout, dans sa globalité, dans son équilibre, dans son harmonie. Car seul compte et existe vraiment ce Tout, caractérisé par cette éternelle dualité, cette ambivalence, figurée par le Yin et le Yang. Aussi, une connaissance plus adaptée, plus pertinente doit se porter au niveau du Tout (qui ne doit pas être entendu comme une vérité donc mais comme un état d'équilibre des contraires) et s'inscrire dans la compréhension de ce Tout. C'est à ce niveau qu'il faut déployer la connaissance. Aussi, dans ce sens on pourrait dire, en extrapolant certes, qu'une connaissance se doit d'être efficace plus que vraie car efficace elle est un chemin, parmi d'autres, œuvrant au sein de l'harmonie du Tout, tandis que cherchant le vrai, elle ne serait qu'une chimère. Ce n'est pas évident à exprimer, surtout que je le comprends moi-même difficilement. Mais au fond, j'ai l'impression qu'il y aurait peut-être un vrai positionnement ontologique, proche de celui qui sous-tend la philosophie taoïste (que j'entrevois très vaguement encore une fois), qui pourrait tout à fait « soutenir » la posture philosophique des Sophistes. Vous semble-t-il possible que la pensée des Sophistes ait pu être sensible à une pareille ontologie et inspirée par quelque chose d'apparenté ? En faite, je crois en la sincérité de l'acteur à l'égard de son propre discours et, pensant que ce devait être le cas chez les Sophistes aussi, j'essaie de situer cette sincérité chez eux....
Deuxième remarque, je ne sais pas où j'ai déraillé mais quelque chose m'échappe dans le raisonnement spéculatif et abstrait de Platon. Si l'on pose quelque chose qui Est, c'est bien qu'on cherche à le définir dans ce qu'il est et non pas dans ce qu'il n'est pas sinon ça n'a aucun sens de poser que quelque chose est ? D'autre part si l'on suit la logique abstraite et spéculative de Platon qui dit que quelque chose qui EST n'est pas en même temps ce qu'il n'est pas et donc être et non-être sont possibles.... alors, allons plus loin cher Platon, quelque chose qui n'est pas, si l'on suit cette logique, cette chose EST également de ne pas être ce qu'elle n'est pas. Ainsi « ne pas être quelque chose » c'est d'abord « être cette autre chose qui s'exprime par la négation » et qui est le fait de ne pas être. En conséquence dans ce raisonnement, être prime toujours sur non-être. Et dans cette logique spéculative et abstraite, on aurait beau jeu d'aboutir à une autre conclusion : le discours ontologique de Parménide n'avait pas besoin de correction platonicienne ! En fait, « être » est une convention qu'on ne peut pas court-circuiter impunément si ce n'est en créant moultes paradoxes... ??
Donc ma remarque est la suivante : devons-nous comprendre que cette spéculation dialectique de Platon est permise soit parce qu'il introduit une nouvelle dimension à Etre que celle qu'envisage Parménide (chez Platon, être signifie « qui possède l'attribution de », alors que chez Parménide être reste cantonner au sens « exister ») ? Soit parce que le statut ontologique des idées platoniciennes, qui existent en elles-même indépendamment de nos pensées, permet de court-circuiter le caractère « conventionnel » de l'idée d'Etre ? Ou alors cette dialectique est-elle permise par ces deux conditions à la fois ??? Ou alors je me suis perdu...J'en ai peur parfois.... Merci de m'avoir lu jusqu'au bout Annick, au plaisir !! Bien cordialement
Bonjour Emilien, voici des réponses qui demanderaient bien d'autres développements, impossibles ici:
- Pour les Grecs en général, la vérité est un discours, pas une réalité: c'est le discours qui dit les choses telles qu'elles sont. On peut donc douter qu'il existe une vérité, c'est-à-dire qu'un discours puisse dire exactement ce que sont les choses, mais personne ne dit qu'il n'existe aucune réalité. Ce que vous dites de la pensée taoïste n'est dès lors pas très différent car il s'agit de rectifier la manière dont on pense arriver au discours vrai, c'est-à-dire correspondant au Tout. La question reste bien sûr de savoir sur quoi s'appuie la doctrine pour affirmer ce Tout et cette complémentarité des contraires.
- Quant au raisonnement de Platon dans le Parménide, ce qu'il pose au départ n'est pas "ce qui est" mais "l'un". C'est à son propos qu'on peut dire a priori ou bien qu'il est (ce qui entraîne immédiatement la correction qu'il n'est pas absolument un, puisqu'on doit distinguer "un" et "être"), ou bien qu'il n'est pas (ce qui est plus cohérent avec le fait qu'il est absolument un, mais qui ne permet d'affirmer rien d'autre). En rejetant cette hypothèse, Platon veut probablement montrer qu'il est impossible de poser n'importe quel concept sans poser aussi le concept d' "être". Celui-ci a donc bien son sens habituel d'exister, incluant tous les types d'existence possibles.
@ Super, merci Annick! Ces réponses me nourrissent très largement et rectifient quelques erreurs d'appréciation de ma part. Je vais remâcher tout ça! Merci beaucoup, au plaisir!!
le travail du philosophe est il de créer des concepts ?
C'est ce que dit Deleuze dans Qu'est-ce que la philosophie? Selon le sens qu'on donne à "concept", on dira que le concept est un outil pour faire avancer la pensée et la compréhension, ou bien qu'il est la pensée elle-même, son mouvement et non son résultat.
En tous cas, oui, le concept est proprement l'oeuvre philosophique, qui se distingue de toutes les autres sortes de notions, y compris des notions scientifiques, parce qu'il n'est pas simplement la généralisation de cas particuliers observables ou le résultat de déductions logiques.
Deleuze en donne de bons exemples au début de son livre, et ça vaut la peine de s'accrocher pour lire ces premières pages même si elles sont plutôt ardues.
il me semble que le 'concept' nous éloigne de la "réalité" en voulant faire du multiple UN, je suis aussi fan de François Jullien qui a fait une conférence sur ce sujet et qui fait le (un ?) point sur ce sujet, vos conférences sont passionnantes et très claires, si vous êtes A.S. ... Université Populaire de Marseille
Si tout ce qui unifie une multiplicité nous éloigne de la réalité, alors le langage le fait en premier lieu, puisqu'on est obligé d'utiliser le même mot des millions de fois pour des choses irréductiblement différentes... C'est une nécessité à accepter, à moins de faire comme ce disciple de Cratyle (mentionné par Platon) qui ne voulait plus parler mais se contentait de désigner du doigt pour atteindre le singulier. Mais même comme ça on est encore dans la confusion puisqu'on ne sait pas si ce qui est désigné est la couleur, la forme, l'expression, ou n'importe quelle autre caractéristique de la chose désignée. Non, vraiment, on a besoin du langage et donc des notions qui sont signifiées par les mots. Cela dit, le concept est plus que la notion, comme je l'ai écrit. Et, par ailleurs, unifier ne signifie pas oublier ou gommer qu'il s'agit d'une multiplicité; on peut passer de la perspective générale à la perspective singulière et vice-versa selon les besoins.
Merci pour vos commentaires.
Annick
l(idée ou la notion de Rien n'a donc aucune réalité...c'est la seule notion ?
Vous avez raison d'insister de cette façon, pour éviter toute formulation imprécise. Ce n'est pas que la notion de "rien" n'ait aucune réalité, c'est qu'elle n'a de réalité que la négation de toutes les autres. Elle n'a aucune définition positive, aucune propriété ou caractéristique par elle-même, sauf l'exclusion de tout. Elle est donc quelque chose de pensable, mais seulement indirectement et non par soi. C'est pourquoi, pour Platon, elle n'est pas une idée, qui doit être une essence déterminée par elle-même.
La différence entre le "rien" et le "non-être", c'est que celui-ci peut être la négation de n'importe quelle notion/idée sans être la négation de toutes à la fois (y compris quand il est la négation de l'idée "être", il n'est pas du même coup la négation de toutes les idées).
Fascinant, non? :-)
Merci et à bientôt,
Annick