LA MORT DU LOUP (Alfred de Vigny)

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  • เผยแพร่เมื่อ 31 ม.ค. 2020
  • La mort du loup (Alfred de Vigny, 1797-1863)
    Les nuages couraient sur la lune enflammée
    Comme sur l'incendie on voit fuir la fumée,
    Et les bois étaient noirs jusques à l'horizon.
    Nous marchions sans parler, dans l'humide gazon,
    Dans la bruyère épaisse et dans les hautes brandes,
    Lorsque, sous des sapins pareils à ceux des Landes,
    Nous avons aperçu les grands ongles marqués
    Par les loups voyageurs que nous avions traqués.
    Nous avons écouté, retenant notre haleine
    Et le pas suspendu. -- Ni le bois, ni la plaine
    Ne poussait un soupir dans les airs ; Seulement
    La girouette en deuil criait au firmament ;
    Car le vent élevé bien au dessus des terres,
    N'effleurait de ses pieds que les tours solitaires,
    Et les chênes d'en-bas, contre les rocs penchés,
    Sur leurs coudes semblaient endormis et couchés.
    Rien ne bruissait donc, lorsque baissant la tête,
    Le plus vieux des chasseurs qui s'étaient mis en quête
    A regardé le sable en s'y couchant ; Bientôt,
    Lui que jamais ici on ne vit en défaut,
    A déclaré tout bas que ces marques récentes
    Annonçait la démarche et les griffes puissantes
    De deux grands loups-cerviers et de deux louveteaux.
    Nous avons tous alors préparé nos couteaux,
    Et, cachant nos fusils et leurs lueurs trop blanches,
    Nous allions pas à pas en écartant les branches.
    Trois s'arrêtent, et moi, cherchant ce qu'ils voyaient,
    J'aperçois tout à coup deux yeux qui flamboyaient,
    Et je vois au delà quatre formes légères
    Qui dansaient sous la lune au milieu des bruyères,
    Comme font chaque jour, à grand bruit sous nos yeux,
    Quand le maître revient, les lévriers joyeux.
    Leur forme était semblable et semblable la danse ;
    Mais les enfants du loup se jouaient en silence,
    Sachant bien qu'à deux pas, ne dormant qu'à demi,
    Se couche dans ses murs l'homme, leur ennemi.
    Le père était debout, et plus loin, contre un arbre,
    Sa louve reposait comme celle de marbre
    Qu'adorait les romains, et dont les flancs velus
    Couvaient les demi-dieux Rémus et Romulus.
    Le Loup vient et s'assied, les deux jambes dressées
    Par leurs ongles crochus dans le sable enfoncées.
    Il s'est jugé perdu, puisqu'il était surpris,
    Sa retraite coupée et tous ses chemins pris ;
    Alors il a saisi, dans sa gueule brûlante,
    Du chien le plus hardi la gorge pantelante
    Et n'a pas desserré ses mâchoires de fer,
    Malgré nos coups de feu qui traversaient sa chair
    Et nos couteaux aigus qui, comme des tenailles,
    Se croisaient en plongeant dans ses larges entrailles,
    Jusqu'au dernier moment où le chien étranglé,
    Mort longtemps avant lui, sous ses pieds a roulé.
    Le Loup le quitte alors et puis il nous regarde.
    Les couteaux lui restaient au flanc jusqu'à la garde,
    Le clouaient au gazon tout baigné dans son sang ;
    Nos fusils l'entouraient en sinistre croissant.
    Il nous regarde encore, ensuite il se recouche,
    Tout en léchant le sang répandu sur sa bouche,
    Et, sans daigner savoir comment il a péri,
    Refermant ses grands yeux, meurt sans jeter un cri.
    J'ai reposé mon front sur mon fusil sans poudre,
    Me prenant à penser, et n'ai pu me résoudre
    A poursuivre sa Louve et ses fils qui, tous trois,
    Avaient voulu l'attendre, et, comme je le crois,
    Sans ses deux louveteaux la belle et sombre veuve
    Ne l'eût pas laissé seul subir la grande épreuve ;
    Mais son devoir était de les sauver, afin
    De pouvoir leur apprendre à bien souffrir la faim,
    A ne jamais entrer dans le pacte des villes
    Que l'homme a fait avec les animaux serviles
    Qui chassent devant lui, pour avoir le coucher,
    Les premiers possesseurs du bois et du rocher.
    Hélas ! ai-je pensé, malgré ce grand nom d'Hommes,
    Que j'ai honte de nous, débiles que nous sommes !
    Comment on doit quitter la vie et tous ses maux,
    C'est vous qui le savez, sublimes animaux !
    A voir ce que l'on fut sur terre et ce qu'on laisse
    Seul le silence est grand ; tout le reste est faiblesse.
    - Ah ! je t'ai bien compris, sauvage voyageur,
    Et ton dernier regard m'est allé jusqu'au coeur !
    Il disait : " Si tu peux, fais que ton âme arrive,
    A force de rester studieuse et pensive,
    Jusqu'à ce haut degré de stoïque fierté
    Où, naissant dans les bois, j'ai tout d'abord monté.
    Gémir, pleurer, prier est également lâche.
    Fais énergiquement ta longue et lourde tâche
    Dans la voie où le Sort a voulu t'appeler,
    Puis après, comme moi, souffre et meurs sans parler. "
  • เพลง

ความคิดเห็น • 21

  • @chantaltn7382
    @chantaltn7382 4 ปีที่แล้ว +5

    Sublimement recitée! Merci

  • @sergelibe1654
    @sergelibe1654 3 ปีที่แล้ว +3

    Merci, c'est si beau ! 👍

  • @pascaljean1
    @pascaljean1 3 ปีที่แล้ว +3

    Quel texte ! Mon dieu, quel texte ! Il m'aura donc fallu attendre 67 ans pour découvrir un tel chef d'œuvre. Un grand merci à Monsieur Axel Kahn qui, mourant, m'aura fait entendre ce monument. Partez sans tourment, monsieur Kahn puisque le loup nous aura montré la voie.

    • @ChamiShaw
      @ChamiShaw  3 ปีที่แล้ว

      En effet un texte très inspirant.

  • @adjalsiahmed6939
    @adjalsiahmed6939 ปีที่แล้ว +3

    Magnifique texte que j'ai découvert il y a 2 ou trois mois, formidable leçon de fierté et de bravoure, le loup attend, les ennemis pourtant nombreux et armés, surpris, il reste aux avant-postes, bouclier pour les siens, quelle noblesse. Cela m'a fait penser à un aphorisme de Sylvain Tesson : "Le coup de fusil part. L'oiseau tombe, moins bas que le chasseur."
    Merci pour ce partage.

    • @ChamiShaw
      @ChamiShaw  ปีที่แล้ว +1

      Oui, quelle leçon. Merci pour votre commentaire.

  • @annouchkasalomon8329
    @annouchkasalomon8329 2 ปีที่แล้ว +3

    Beau à en pleurer

  • @christianeschierer8423
    @christianeschierer8423 9 หลายเดือนก่อน +1

    Wow, magnifiquement interprété. Si le texte est sublime, il est magnifié par la voix qui le porte.

  • @akpoonne
    @akpoonne 10 หลายเดือนก่อน +2

    Belle vidéo pour accompagner ce que je considère comme l'un des plus beaux poèmes.
    Mais tellement sublimer par la diction et l'interprétation de Gérard Philippe, qu'on ne peut qu'admirer une telle réalisation.
    D'autres ont essayer de le réciter, personne n'est parvenu à une telle perfection.

    • @ChamiShaw
      @ChamiShaw  10 หลายเดือนก่อน +2

      Merci et je suis assez d'accord avec vous pour l’interprétation de Gérard Philippe.

  • @marie-soleilbernardstup
    @marie-soleilbernardstup ปีที่แล้ว +1

    Merci. Contente de redécouvrir 30 année

  • @ahmedjidouelkhalile9372
    @ahmedjidouelkhalile9372 2 ปีที่แล้ว +2

    Mon dieu. Que c'est fantastique. Voilà au moins une chose qui me met hors de moi même. Ici, l'imagerie donne à la poésie quelque chose de céleste. ' gémir, pleurer, prier est également lâche.
    Fais énergiquement ta longue et lourde tâche.
    Dans la voie où le sort à voulu t'appeler.
    Puis après comme moi, souffre et meurs sans parler.

  • @elizabethcouturier6688
    @elizabethcouturier6688 4 หลายเดือนก่อน +2

    Dommage pour la musique...
    Ça n'accompagne pas, ça réduit la puissance du poème.

    • @ChamiShaw
      @ChamiShaw  3 หลายเดือนก่อน

      Je ne suis pas de cet avis ... ça va de soit.

  • @micmacmec
    @micmacmec 3 หลายเดือนก่อน +1

    Il dit " loup-cervier", alors il parle de la lynx?

    • @ChamiShaw
      @ChamiShaw  3 หลายเดือนก่อน

      Le lynx est un mammifère carnivore de taille moyenne, de la famille des Félidés. Le Lynx du Canada (Lynx canadensis), aussi appelé Loup-cervier, se distingue du lynx roux d'Amérique du Nord par ses oreilles touffues, ses larges pattes et ses longs membres. De plus, il n'a pas de tache blanche sous le bout de la queue.

    • @micmacmec
      @micmacmec 3 หลายเดือนก่อน

      Oui, ça va, mais je disais que l'auteur parle du "loup cervier", ou je me trompe? Et alors il parle de lynx pas de loup... pour ce qui vaut dans l'économie du tout...

    • @ChamiShaw
      @ChamiShaw  3 หลายเดือนก่อน

      @@micmacmec C'est plutôt "Le plus vieux des chasseurs" qui a déclaré qu'il s'agissait de marques de loups-cerviers. Il s'est sans doute trompé. (on jase).

    • @micmacmec
      @micmacmec 3 หลายเดือนก่อน +1

      ​@@ChamiShawil dit que jamais le vieux chasseur était en defaut 😂😂
      alors... une petite licence poétique et ça suffit, on ne jase plus, il faut apprendre la leçon du silence!

  • @philippeory9165
    @philippeory9165 2 หลายเดือนก่อน

    Musique et images inutiles.
    La voix de Gérard Philipe se suffit à elle même.

    • @ChamiShaw
      @ChamiShaw  2 หลายเดือนก่อน

      Sans doute pour ça que Reggiani en a fait plusieurs avec de la musique ? Les images en effet sont superflues mais ce qui est extraordinaire c'est qu'on peut fermer les yeux et se concentrer.